Enfin, les syndicats sont sortis du bois. Et ça se voit. Des dizaines de milliers de manifestants ont ainsi répondu présent à l’appel, notamment, de la CGT, de FO, de FSU et de Solidaires, mais aussi des lycéens et des étudiants.
Une foule dense — impossible de la dépasser dans l’étroit parcours allant de l’hôtel de ville à la Concorde —, mais, malgré tout, divisée. 30.000 personnes à Paris selon la CGT. Près de 300.000 dans tout le pays. Devant, le cortège de tête fait sa réapparition. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que le "black bloc" était là en nombre, en force. En fin de manif, les syndicats, nombreux aussi. Entre les deux, un subtil mélange de gilets jaunes — très nombreux — et de citoyens sans signe distinctif, ces derniers formant le gros des manifestants.
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C’est dans une ambiance particulière que tous se retrouvent. Il y a une forme de défiance, comme si un malentendu les réunissait. Exemple frappant quand la foule entonne la Marseillaise et que, au micro, un syndicaliste répond avec l’Internationale.
Si l’on voulait caricaturer, on dirait que l’ancien monde social et le nouveau se regardaient en chiens de faïence.
A quoi joue la police ?
Il faut saluer ici le sang-froid de la foule face aux forces de l’ordre. À plusieurs instants, la situation aurait pu exploser, mais nul n’a cédé aux provocations. D’abord lorsque le cortège de tête est passé devant le Conseil d’État. Sa décision de ne pas interdire le LBD est dans tous les esprits. On a bien cru que les manifestants allaient pénétrer dans le bâtiment. Mais non.
Plus tard, quelques dizaines de CRS entament des mouvements au niveau de la place Vendôme. Ils remontent la manif sous les arcades de Rivoli. L’ironie du sort les fait se positionner rue d’Alger — en mémoire de leur héritage ?
Faut-il n’avoir aucune honte pour envoyer ainsi ces hommes servir d’appâts aux "casseurs" ? Mais le guet-apens n’a pas fonctionné. Les casques bleus ne trouveront que des huées, des "tout le monde déteste la police". Et un sentiment massif : les gens ont peur des forces de l’ordre.
### Interlude ###
Ce chant, "tout le monde déteste la police", aura été principalement scandé par des non-gilets jaunes. Ces autres lui préférant "la police avec nous". Comme un air de Nuit debout.
### Fin de l’interlude ###
Pendant ce temps-là, à l’Assemblée...
Finalement, la manif arrive à Concorde sans qu’il y ait vraiment eu accrochages avec les CRS. Loin derrière, les syndicats et leur impressionnant service de sécurité ont laissé plusieurs dizaines de mètres entre eux et le reste des manifestants. Pourquoi ?
La place de la Concorde sera témoin d’une de ces crapuleries de l’histoire de France. Rive droite, les manifestants, majoritairement pacifiques, se font gazer. Rive gauche, les députés votent la loi anti-manifestants. Toute honte bue. Les quelques députés abstentionnistes de La République en marche ne sont que poudre de perlimpinpin.
Il faudra, au prochain rendez-vous de cette convergence naissante, être bien plus nombreux, soudés et déterminés pour faire réellement trembler ce monde en déclin.
L’initiative de la CGT a permis à chaque composante du "mouvement social" de se positionner. Force est de constater que, du côté syndical, on est loin du compte. La position de classe de la CFDT et de la CGC (et d’une grande partie de FO) favorable à l’ordre libéral établi ne va pas faciliter les appels à la grève générale, seule hypothèse qui effraie le patronat.
Autre composante en sommeil, les étudiants. Les lycéens auraient bien des choses à leur apprendre en terme de prise de conscience politique.
Le pataquès à "gauche" avec un axe ps-hamon-gluksman trés européo-libéraux compatible et trés éloigné de la FI et du NPA ne permet pas de sauter de joie révolutionnaire.
Les gilets jaunes, si l’on arrive à en extirper la frange (fange) brune, peuvent contraindre les sus-nommés à se déplacer d’une position inefficace politiquement vers une position active.
Ceci serait bienvenu notamment dans cette période de pourissement de l’Etat en proie à des scandales dignes de la cour du tsar.
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