Le quinquennat accélère le rythme de la vie politique, et quelques mois seulement nous séparent de l’élection présidentielle. Tout le monde est dans les starting-blocks. La campagne est lancée, même si l’on ignore à ce stade qui sera effectivement - et jusqu’au bout - sur la ligne de départ. Une seule certitude : les effets de la crise sanitaire sur nos modes de vies, nos rapports humains, notre santé – morale et physique –, notre économie, notre culture, seront au cœur des enjeux, des discours et autres promesses politiques.
La crise sanitaire a exacerbé ce qui existait déjà : la contestation du néolibéralisme et la remise en cause d’une mondialisation de plus en plus financiarisée, l’épuisement d’un système qui nous fait courir à notre perte, ou encore la crise écologique et démocratique. Pouvons-nous continuer comme avant ? Nous relèverons-nous de la crise en faisant le pari de la croissance et de la consommation quoi qu’il en coûte ?
Le Covid-19 a révélé une ambiguïté : la puissance de nos sociétés et l’impuissance de nos pays. Nos sociétés ont tenu bon parce que ceux qu’on a appelés les secondes lignes, les derniers de cordées – des personnels soignants aux caissières de supermarché en passant par les éboueurs ou les livreurs – ont été présents, renversant au moins pour un temps la hiérarchie sociale des métiers. Nos pays, s’ils ont été puissants dans leur capacité à décider d’un seul homme le confinement de tous, ont été défaillants dans la gestion de la crise sanitaire (masques, tests, confinement, vaccins).
Et pourtant, en France, chacun y va de son satisfecit. « Nous avons organisé la meilleure rentrée scolaire en Europe » (Jean-Michel Blanquer) ; « Pas un pays au monde n’a fait ce que nous avons fait pour sauver les entreprises » (Bruno Le Maire) ; « Nous sommes le seul pays à avoir autant testé la population » (Olivier Véran). La crise a été le concours d’une compétition permanente. Parce qu’au fond, ceux qui nous dirigent ont une obsession : même s’il faut trahir la vérité, la France doit être une puissance aussi incontournable qu’incontestable aux yeux du monde.
En politique, a fortiori à la veille d’une élection présidentielle, il n’y a pas de discours sur la France sans idée de puissance. Mais la France est-elle une puissance ? Si oui, laquelle ? Est-elle seulement puissante ? Si oui, comment ? Nous avons demandé à des hommes et des femmes politiques, responsables associatifs, intellectuels, personnalités issues des arts et des lettres de réfléchir à cette idée de puissance.
Bonne lecture.
DOSSIER : LES VERTIGES DE LA PUISSANCE
>>Les vertiges de la puissance
>>Michaël Fœssel « Un pouvoir autoritaire mise sur le sentiment d’impuissance des citoyens »
>>Ariane James-Sarazin « La guerre est à la source de l’autorité politique »
>>Gafam, un impérialisme numérique
>>Suède : l’anti-puissance
>>Lola Lafon « Si on est puissant, c’est qu’en bas il y a des impuissants »
>>Sandra Regol, La puissance des communs
>>Charlotte Girard, La puissance comme souveraineté
>>Elsa Faucillon, Puissance des imaginaires
>>Ségolène Royal, Dérisoire « puissance »
>>Christian Paul, Redonner du sens à la puissance
>>Françoise Vergès, Puissance destructrice
>>Caroline De Haas, Faire rimer « puissance » et « bienveillance »
>>Jean-Luc Mélenchon, « Pas de réelle souveraineté populaire sans puissance »
