On a beau chercher, on n’a pas trouvé. La seule carte de France avec les résultats du parti présidentiel est une carte vierge. Le désert. À croire qu’ils n’ont même pas participé au match…
Et le Rassemblement national ? Parfois second, souvent troisième, le parti d’extrême droite fait lui aussi dans la figuration.
VOIR AUSSI SUR REGARDS.FR
>> Régionales et départementales 2021 : le débrief de la rédaction
Mais à écouter les uns et les autres, tout va bien. Tout… Va… Bien !
RN, le seum
Jordan Bardella, le « gendre idéal », le mec que « c’est vrai qu’il est sympa » (dixit Le Monde), avait le seum. Ça se voyait, hier soir, sur son visage. Il lui manquait juste le maillot de la Belgique.
Ces élections sont un « échec pour l’intégralité de la classe politique », lance le vice-président du RN. Ou encore : « Quand des élections se déroulent dans un désert d’indifférence, c’est un échec pour la démocratie dans son ensemble. Toute la classe politique doit accueillir ces résultats avec humilité ce soir. » L’abstention, soudainement, à bon dos. Tout le monde va s’en servir.
Appréciez le seum d’Andréa Kotarac, candidat RN en Auvergne-Rhône-Alpes ayant obtenu 11% des voix : « Il ne faudra jamais perdre de vue que notre assemblée régionale aura une légitimité moindre quand on sait que 67% des électeurs se sont abstenus. » Le député européen RN Jérôme Rivière se veut, lui, lucide : « Nous ne devons pas nous en prendre aux électeurs, ils en ont assez de ce système et ils l’expriment ! » Pas sûr que Marine Le Pen like son tweet. Elle qui exhortait son électorat au soir du premier tour à se « déconfiner », parlant de « désastre civique ». Un appel qui n’a pas été entendu…
D’ailleurs, au RN, on n’arrête pas de taper sur les électeurs. Prenez donc Jean-Lin Lacapelle qui, comme son nom ne l’indique pas, est lui aussi eurodéputé RN : « Aujourd’hui, nous constatons qu’il y a une prime aux sortants : tous les présidents de région ont été réélus. Les Français n’ont pas compris le double scrutin et quelles étaient les compétences des Régions et des départements ! » Traduction : vous êtes tous des cons.
Mais voilà, même face à l’abstention massive, même face à un électorat de gueux, le RN voit de la lumière au bout du tunnel. Ils ressortent leur vieille carte joker : l’opposition, c’est nous. Ainsi, Julien Odoul, amateur de voile, déclare : « L’abstention remporte ces élections régionales et dirigera virtuellement la Bourgogne Franche-Comté pendant 6 ans. [...] Le RN sera la 1ère force d’opposition avec 18 élus. L’avenir se prépare aujourd’hui. » Première force d’opposition si on ne compte pas les élus LR, donc. Tout est question de point de vue...
Regardez aussi ce commentaire de Laure Lavalette, conseillère municipale RN à Toulon, qui analyse les résultats en PACA : « Quand on fait 45% tout seul, où est-ce que vous voyez une défaite ? Non mais on n’a pas gagné, ces messieurs-là y seraient allés seuls, ils auraient perdu ! » Thierry Mariani a perdu, mais ce n’est pas une défaite. Et si ça avait été autrement ça ne serait pas pareil. Ça ne veut rien dire.
LREM, le seum
L’ambiance est sensiblement la même dans les rangs de la majorité. « Je ne dirais pas que c’est un échec : ça n’a pas marché », disait Emmanuel Macron il y a peu, parlant de l’application StopCovid. Elle marche bien aujourd’hui aussi cette citation.
Il y a les optimistes, comme la ministre de la Transformation [1] Amélie de Montchalin, qui dit ceci : « En Marche continue de s’ancrer localement. Nous pourrons compter sur des centaines de nouveaux élus locaux dès ce soir. Ils mèneront une opposition constructive pour sortir nos territoires des matchs droite gauche stériles. »
Puis il y a ceux qui ont quand même gagné. Parce que, figurez-vous, le seul objectif de LREM dans la vie, c’est de battre le RN – comment ça vous ne vous en étiez pas rendu compte ? Olivia Grégoire, secrétaire d’État chargée de l’Économie sociale, solidaire et responsable : « Réjouissons-nous collectivement d’avoir fait battre le RN, à nous dès maintenant d’aller faire gagner la République. » ; Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique : « Restons mobilisés pour un recul durable de l’extrême droite en France. » ; Stanislas Guerini, délégué général du parti : « Le RN ne gagne aucune région ce soir. La majorité présidentielle a joué un rôle responsable. » ; Marlène Schiappa : « Vous avez pu compter sur la majorité présidentielle pour faire battre le RN aux régionales. Vous pourrez encore compter sur nous pour battre le RN aux présidentielles. »
Il y a aussi, à LREM, ceux qui délirent complètement. La palme revient à Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée chargée de l’Industrie : « Ce soir, dans toutes les régions de France, c’est la République qui l’a emporté. »
Bref, croyez-en les sages paroles de Stanislas Guerini : « On ne perd jamais quand on porte ses couleurs et ses convictions. »
C’est beau, non ? Aussi beau que le jeu de la Belgique.