Regards. Quel est l’enjeu de cette journée de débats ?
Ingrid Hayes. L’idée, c’est de remettre sur l’établi la question stratégique, de rester en prise avec les mobilisations et les discussions actuelles, tout en prenant le temps de se poser. On ne prend pas assez ce temps quand on court au rythme de l’actualité, et pourtant il y a une série d’événements, de défaites aussi, qui invite à reprendre cette discussion. L’expression « révolution citoyenne » rappelle la nécessité d’une rupture radicale et en même temps souligne la dimension centrale de la démocratie et de l’engagement des citoyens.
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Comment va se dérouler cette journée ?
On a prévu trois moments. D’abord une table-ronde d’ouverture, le matin, pour revenir sur la question du « sujet révolutionnaire », pour reprendre l’ancien vocabulaire, afin de questionner les notions de prolétariat, de peuple, de classes, de nation. On va discuter de la dimension unifiante ou non du peuple, des classes, de leurs fragmentations, etc. Ensuite, dans l’après-midi, on commencera par deux ateliers : un premier qui se consacrera au bilan des révolutions citoyennes en Amérique latine ; un deuxième qui concernera la mobilisation des gilets jaunes avec cette question : qu’est-ce qu’on peut faire en terme de politique avec un mouvement social de ce type, atypique ? Enfin, la journée se conclura par une table-ronde qui abordera les problématiques de la conquête et de l’exercice du pouvoir. La conquête : avec l’articulation entre institutions et mobilisations. L’exercice du pouvoir : une question revisitée, notamment après l’échec de Syriza en Grèce, à savoir quelle démocratie met-on en place, quelles politiques met-on en œuvre ?
« Les divisions/discussions stratégiques qui ont pu structurer le champ politique ces dernières années ne sont pas nécessairement celles qui structureront le champ politique à venir. C’est aussi pour ça qu’il faut arriver à en discuter. »
Qui participe à ces tables-rondes ?
Cette journée est donc organisée par Ensemble Insoumis, un courant d’Ensemble impliqué dans La France insoumise. On a décidé d’avoir un spectre assez large d’invités. Il y aura des membres de LFI, notamment Eric Coquerel et Manuel Bompard, mais aussi des invités comme Elsa Faucillon, Olivier Besancenot, Annick Coupé, Pierre Khalfa, Christophe Aguiton, Janette Habel, Sergio Coronado, etc. On est allé chercher du côté des gens avec lesquels on discute, on lutte.
Le besoin de penser, de débattre, est-il plus important, plus pressant en ce moment à gauche ?
Oui, ça paraît assez évident. La difficulté, c’est l’injonction au rassemblement, qui peut parfois faire obstacle à la discussion stratégique. C’est une dimension qu’il ne faut pas mettre de côté, l’urgence à se rassembler, certes, mais il faut que ça ait un caractère opératoire dans la situation politique et sociale actuelle. Et puis il faut prendre en compte le fait que les divisions/discussions stratégiques qui ont pu structurer le champ politique ces dernières années ne sont pas nécessairement celles qui structureront le champ politique à venir. C’est aussi pour ça qu’il faut arriver à en discuter. Il y a une nécessité pressante de débats, une volonté aussi.
Propos recueillis par Loïc Le Clerc