CC United Nations Photo
Accueil | Par Fabien Perrier | 12 juin 2019

En Grèce, l’onde de choc des élections européennes

En Grèce, le parti Syriza a subi une défaite importante aux élections municipales, régionales et européennes qui viennent de se tenir. Le Premier ministre a déclenché des élections législatives anticipées.

Vos réactions
  • envoyer l'article par mail envoyer par mail
  • Version imprimable de cet article Version imprimable

« Je demande la dissolution du parlement et la tenue d’élections nationales. » Ces mots, le Premier ministre grec Alexis Tsipras les a prononcés le lundi 10 juin dans le Palais du Président de la République hellénique Prokopis Pavlopoulos. Le président a accepté la demande. Puis, Alexis Tsipras est ressorti. Quelques minutes plus tard, il était au Palais de la musique pour le premier meeting de campagne de Syriza, son parti. Pourtant, depuis le début de l’année, des proches de l’exécutif répétaient en boucle que le gouvernement irait au terme de son mandat et que les élections législatives se tiendraient en octobre. Les résultats du 26 mai ont changé la donne.

 

LIRE AUSSI SUR REGARDS.FR
>>
Alexis Tsipras, coup de poker ou repositionnement politique ?

 

Ce jour-là, le scrutin – le premier depuis les législatives de septembre 2015 – avait des allures d’élections générales. Les Grecs devaient voter pour les européennes ainsi qu’aux premiers tours des municipales et des régionales. Les trois scrutins se sont soldés par une sanction contre Syriza au profit de son principal parti d’opposition, Nouvelle Démocratie (ND), la droite conservatrice. Aux européennes, ND a récolté 33,12% des suffrages exprimés contre 23,76% pour Syriza. Aux régionales, Syriza a tout perdu, excepté la Crête grâce à une alliance avec le Pasok. Quant à la capitale Athènes et la deuxième plus grande ville Thessalonique, elles passent dans les mains de la droite.

Sanction sans appel

Elle a plusieurs causes. Tout d’abord, une part de la population grecque n’a pas accepté la signature de l’accord de Prespes qui apporte une solution au conflit gelé avec la « République de la Macédoine du Nord ». D’ailleurs, la différence entre ND et Syriza est particulièrement importante dans le nord du pays, à la frontière avec Skopje – nom de la capitale du voisin. En Attique, Syriza est porté responsable de la mauvaise gestion des incendies qui ont ravagé la côte nord et ouest de l’Attique à l’été 2018. La gauche grecque perd cette région symbolique remportée en mai 2014. Cette victoire annonçait que Syriza avait le vent en poupe à l’échelle nationale. Mais le vent a tourné.

A l’époque, Syriza faisait campagne contre l’austérité et proclamait la sortie des « mémorandums », les accords de prêts de l’UE, de la BCE et du FMI, en échange de l’application de réformes comme des privatisations, des hausses de taxes, la casse des conventions collectives... Mais après son élection en janvier 2015, Alexis Tsipras et son équipe échouent à changer le cours d’une Union européenne majoritairement à droite. À l’été 2015, ils sont contraints de signer à leur tour un troisième mémorandum ; Syriza se divise. Alexis Tsipras et son équipe veulent utiliser les faibles marges de manœuvre laissées par le mémorandum pour « protéger » les plus défavorisés.

« Malgré les mémorandums, nous n’avons pas suivi une voie néolibérale et nous avons même fait annuler des demandes irrationnelles, comme un passage à un système privé d’assurance-chômage ou une énième baisse des retraites qu’exigeait le FMI, explique Giorgos Katrougalos, le ministre des Affaires étrangères. Mais il est vrai que nous n’avons pu appliquer notre propre politique de gauche qu’à partir de fin août 2018, après la sortie du mémorandum. »

Syriza, à l’épreuve de la défaite

Le taux de chômage, qui a atteint un pic de 27,9% en 2013, s’élève désormais à 18,1%. Mais les salaires restent faibles. Le salaire moyen brut a chuté de 1443 euros en décembre 2009 à 1165 euros bruts en décembre 2018, selon une source proche du gouvernement. Pendant la même période, le salaire moyen à temps partiel est passé de 507 euros à 391 euros bruts. Le seuil de pauvreté s’élève à 382 euros. Pour tenter de sortir de la spirale de la paupérisation, le gouvernement a rétabli, avec les partenaires sociaux, des conventions collectives dans différents secteurs, supprimé le « Smic jeune » pour les moins de 25 ans et augmenté le salaire minimum de 11 % pour tous (650 euros brut, contre 586 euros auparavant). En outre, la Grèce, dont la dette s’élève à 180% du PIB, reste sous la surveillance renforcée de ses créanciers et est contrainte de dégager un excédent budgétaire d’au moins 3,5% de son PIB chaque année pour être en mesure de rembourser ses dettes. Elle est parvenue à dégager un excédent de 4,4% du PIB cette année, contre 3,9% l’an dernier.

Syriza lance sa campagne en promettant d’améliorer le sort de la classe moyenne que le parti a « perdue » selon différents observateurs. Dans les sondages, ND est toujours au moins 7 points devant le parti au gouvernement pour le vote du 7 juillet. L’enjeu pour Syriza est désormais d’avoir un groupe parlementaire le plus important possible, mais probablement dans l’opposition. Et que le parti Syriza – une construction relativement récente – reste soudé face à l’épreuve de la défaite.

 

Fabien Perrier

Vos réactions
  • envoyer l'article par mail envoyer par mail
  • Version imprimable de cet article Version imprimable

Vos réactions

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.