Il fut un temps où Emmanuel Macron qualifiait les chasseurs de « premiers écologistes de France ». On rigolait bien à l’époque. C’était en 2018. Le Président a toujours été un grand défenseur de la chasse. Rappelez-vous en 2017, le candidat promettait alors la « réouverture des chasses présidentielles ». Le quinquennat n’était pas entamé et déjà Jupiter perçait.
Au fond, Emmanuel Macron s’en moque. Vous le voyez chasser tous les week-ends ? Il préfère le jet-ski... En revanche, il sait, comme bien des hommes et des femmes politiques, que le lobby de la chasse est fort, uni, et pèse pour, a minima, un million d’électeurs. Non négligeable quand on se souvient qu’en 2017, le ticket pour le deuxième tour de la présidentielle était à 7,6 millions.
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Sauf que, manque de chance, en ce mois de novembre 2021, le président de la Fédération nationale des chasseurs, s’est donné en spectacle dans plusieurs médias. Force est de constater qu’après plusieurs de ses saillies, il n’est pas le président des écologistes. Avouez que vous ne vous y attendiez pas !
Voici ce que disait Willy Schraen, le 10 novembre, sur RMC, au sujet de la biodiversité : « Tu penses qu’on est là pour réguler… Mais tu n’as pas compris qu’on prend du plaisir dans l’acte de chasse ? [Tuer], ça en fait partie. Tu crois qu’on va devenir les petites mains de la régulation […]. Je n’en ai rien à foutre de réguler. »
Le buzz est aussi violent qu’une volée de plomb dans un automobiliste. Mais bon, « le risque zéro n’existe pas »… S’ensuit un entretien au Journal du Dimanche où Willy Schraen, déplorant « qu’on médiatise beaucoup trop les accidents de chasse », renchérit : « Depuis des années, la chasse fait fausse route (sic !). Nous-mêmes, chasseurs, nous avons eu tendance à la présenter uniquement comme quelque chose d’indispensable à la gestion des nuisances, notamment de la surpopulation de certains grands gibiers. C’est une erreur de fond. La chasse, c’est d’abord une transmission familiale, une passion. Nous sommes en même temps des chasseurs passionnés et des régulateurs vigilants. Il faut donc mettre en avant notre passion et l’assumer, même si ça crée une polémique. »
Quitte à passer pour des fachos...
Une polémique peut en cacher une autre. Dans ce même entretien, Willy Schraen, visiblement lassé de jouer au garde-forestier, propose un autre statut pour lui et ses amis chasseurs : miliciens du dimanche. « Nous avons un rôle à jouer en matière de police de proximité » afin de lutter contre « une délinquance rurale et environnementale », avance-t-il. Après tout, qui serait mieux placé pour ça que celui qui n’en a « rien à foutre de réguler » ? Malheureusement pour Willy Schraen, ce doux rêve d’avoir un permis de tuer autre chose que des cerfs et des sangliers a reçu une fin de non-recevoir de la part du président des maires ruraux de France. Michel Fournier, estime en effet que les chasseurs « n’ont pas la neutralité nécessaire pour faire des contrôles en forêt ».
Il a beau être fan d’Emmanuel Macron – qui « a fait des choses pour la chasse qu’aucun président n’a fait » ou qui « reprend les dossiers en main quand c’est compliqué Barbara Pompili ou sa secrétaire d’État Bérangère Abba » –, il a beau juger que « la chasse est ouverte au dialogue avec tous, de Fabien Roussel à Éric Zemmour », Willy Schraen se situe un peu plus à droite que le président de la République. Un peu beaucoup plus à droite. Disons proche de la ligne du vice-président des Républicains Gilles Platret – qu’il a soutenu aux dernières élections régionales –, un des chantres de la théorie du grand-remplacement au sein du parti de la droite « républicaine ».
Alors, n’allez surtout pas lui parler des écologistes, ces « terroristes de la cause animale » – ayons ici une pensée pour tous les gibiers terrorisés par Yannick Jadot. Ainsi, quand Yannick Jadot, fin octobre, propose d’interdire la chasse le week-end et pendant les vacances scolaires, Willy Schraen dénonce une prise de position « politique, à l’approche de la présidentielle » – avouez que vous ne vous y attendiez pas non plus, venant d’un homme politique en campagne présidentielle !
Lors de la saison 2019-2020, la chasse a fait 141 victimes en France, parmi lesquelles onze ont perdu la vie. Entre 1998 et 2020, 505 personnes ont été tuées par des chasseurs.
