La dernière circulaire de l’Education nationale concernant l’éducation sexuelle stipule que « 3 heures annuelles soient dispensées aux élèves de la 6e à la terminale ». En plus des cours de sciences naturelles, où la reproduction et les maladies sexuellement transmissibles (MST) sont étudiées, le système prévoyait d’approfondir ces connaissances dans des séances fondées sur le dialogue. En réalité, seulement 50% des établissements en dispensent. Et lorsqu’ils le font, c’est généralement une seule fois au cours de la scolarité, en classe de quatrième. Les professeurs ne sont pas formés à cette matière, les associations qui les remplacent sont rares, et la prévention contre le tabac, les drogues et les comportements à risque passe souvent en priorité. Mais où les jeunes font-ils donc leur éducation sexuelle ?
Elle se faisait autrefois au travers de la littérature et des copains. S’y ajoutent aujourd’hui Internet, les films pornographiques, les radio libres et les magazines pour ados. Tapez le mot « Sex » sur « Google », le moteur de recherche vous proposera 571 millions de pages... Avec la prolifération des accès Internet dans les foyers français, trois jeunes sur quatre ont déjà vu un film porno à l’âge de quatorze ans. La journaliste Anne Stetger, qui a longtemps rédigé les pages « sexo » de magazines comme Newlook ou Girls, explique par ailleurs qu’« aucun magazine jeunesse ne peut s’abstenir de parler sexualité. Ces titres s’adressent en priorité à des ados qui n’ont pas de copain ou de copine, en jouant sur leur frustration. En général, lorsqu’ils rencontrent quelqu’un, ils commencent par cacher leur magazine, puis ils arrêtent de l’acheter ». Mais les premiers éducateurs sexuels de France sont à chercher du côté des émissions de radio : Difool, qui exerce depuis plus de dix ans sur Skyrock, ou Jessyca Falour, qui accueillait les déboires des ados sur Le Mouv’. C’est vers eux que la majorité des jeunes se tourne pour trouver des réponses aux questions qu’ils n’osent pas poser à l’école devant leurs camarades. Pour Jessyca Falour, leurs préoccupations concernent « évidemment la sexualité en premier, mais pas seulement. Les changements qu’ils ressentent reviennent fréquemment, tout comme les rapports avec les parents et le sexe opposé. Le vrai avantage de ces émissions, c’est l’anonymat ».
L’Education nationale doit trouver sa place face à cette nouvelle donne. Sans verser dans l’intime, la mission de l’école n’est-elle pas de donner accès à de plus amples connaissances ? Sur les six manuels disponibles en Sciences de la vie et de la terre destinés aux classes de quatrième, seul Bordas faisait mention du clitoris. Défini, en creux, comme « l’équivalent de la verge chez l’homme », l’ouvrage omet de mentionner que c’est aussi l’organe du plaisir. C’est sans doute révélateur d’une carence qui, au-delà de l’école, touche l’ensemble de la société. V.S.