« Où est le jardin
et dans le jardin
l’ombre du figuier
où est le repos ? »
A la recherche d’un jardin perdu, Marielle Anselmo pose des signes légers de passage dans une poésie qui a la fulgurance de l’instantané et l’étendue de la rêverie. Une cadence triste frappe le voyage dans la nuit, l « amour/étrange lanterne » illumine d’un halo mélancolique une « langue plus légère » , passage initiatique vers la luxuriance des îles grecques. Il y a comme un crescendo d’un bout à l’autre de ce recueil où le temps est oublié, le vécu s’installe avec simplicité dans « les premiers mots de la langue » . Un soupçon de biographie se dévoile, la Méditerranée de ses racines, un frère « plus délicat/que la branche et la feuille et la fleur/du jasmin/dieu l’a cueilli » . Un aveu de feu : « éprise de toi/captive/ô ma captive » . On entend murmurer derrière : « mon enfant, ma sœur, songe à la douceur d’aller là-bas : vivre ensemble » , toute la lenteur du poème baudelairien...
Marielle Anselmo aime ces moments qu’elle sait enfermer en quelques mots, « où le citronnier/en terrasse/borde le figuier/l’ombre enfin venue/les chats courent sous le feuillage/nous nous éveillons » . Un désir de paresse la soustrait à une lancinante obsession : « tous les mots de la langue/sont perdus » . Une sérénité linguistique l’accompagne, mais le doute pointe : « aimer l’infini bleu/mais aller malgré soi vers athènes/à terre » . Ce doute où le mystère de la poésie naît.
J.M.
Marielle Anselmo , Jardins , Tarabuste éditeur, 12 ?
Paru dans Regards n°68, janvier 2010