1995,
Les chiens de garde peuvent aboyer à la vue
du cortège passant, rien n’y fait. N’en déplaise aux
Alain – Minc et Duhamel – en ce mois de novembre
1995 ce n’est ni la « fièvre collective » ni le « goût du
spasme » qui font descendre par milliers les Français
dans la rue et tenir le piquet de grève. Dans la lutte
contre le plan Juppé, l’unité syndicale triomphe enfin,
immortalisée par la poignée de main entre le cégétiste
Louis Viannet et Marc Blondel de Force ouvrière. Si la
gauche radicale ne parvient pas à prendre le train
du mouvement social en marche, elle compte bien se
laisser porter par le souffle de la contestation.
1997,
Vilevoorde : c’est au fin fond de la Belgique
flamande que s’érodent les premiers espoirs de la
gauche radicale unie au gouvernement Jospin.
Portée par l’élan des mouvements sociaux de 1995
la gauche, du PS à la LCR de Krivine, en passant par
Les Verts, les chevènementistes et le PCF de Robert
Hue, scellait un an plus tôt à Bercy un pacte d’union
gouvernementale : « la gauche plurielle ». Juchée sur
ses strapontins ministériels, la gauche radicale pourtant
déchante très vite. En Flandres, les « camarades belges »
abandonnés par le groupe français Renault doivent
quitter l’usine, au PCF les militants dégrossissent
les rangs.
1999,
Alors que l’image d’un Fabien Barthez bécotant
un Big Mac envahit les espaces publicitaires du
pays, à gauche un nouveau mouvement s’épanouit :
l’altermondialisme. Portées par la toute jeune Attac
et la fondation Copernic, dans les forums, les festivals
et les manifestations, c’est en marge des partis que
fleurissent les initiatives militantes. À Millau, le 16 août,
le « démontage » du Mac Do emmené par José Bové,
charismatique leader de la Confédération paysanne
inscrit de nouvelles formes d’action
au répertoire militant.
2002,
À gauche toute, les espoirs d’unité s’évaporent.
Au 1er tour, les voix cumulées de Daniel Gluckstein,
Robert Hue, Olivier Besancenot, et Arlette Laguiller
atteignent près de 14 %. Mais un an plus tard, des
militants de la gauche radicale, exaspérés par la
division, appellent au regroupement : signé par
plusieurs centaines de personnes, « l’appel Ramulaud »
esquisse les premiers pas des antilibéraux.
2005,
« Le non socialiste existe, il prend sa place
dans un non de gauche. » Quoi qu’en dise le sénateur
socialiste d’alors, Jean-Luc Mélenchon, qui tient tribune
commune avec la secrétaire générale du PCF deux
mois avant le vote, il n’y a pas de place dans le camp
de la rose pour les nonistes dissidents. Surprise dans
les urnes, ce « non de toutes les forces » rappelle aux
forces politiques l’urgence des questions sociales. Chirac
vacille, le PS se déchire : le référendum sur le projet de
Constitution européenne replace sur le devant de la
scène politique la gauche radicale.
2009,
Tsahal bombarde Gaza, les Guadeloupéens
entrent en grève générale, en ce début d’année
détonnant, le Nouveau parti anticapitaliste fait le
pari d’agréger les forces vives anti-système. Aux
élections européennes, le Front de gauche, initié par
les socialistes démissionnaires Marc Dolez et Jean-Luc
Mélenchon, instigateurs du Parti de gauche en 2008,
réunit sous un même étendard les forces vives petites et
grandes de la gauche antilibérale.
2011,
Coup de force réussi pour le coprésident du
Parti de gauche. Pour la première fois depuis 1981,
le PC ne présentera pas de candidat à l’élection
présidentielle. Écartant son soldat désigné, André
Chassaigne, il se range finalement derrière la figure
charismatique de Jean-Luc Mélenchon.
La dynamique est lancée.