L’Union de la gauche a une histoire très conflictuelle. Vivons-nous aujourd’hui le énième épisode de cette histoire ou entrons-nous dans une période nouvelle des relations à gauche ? Et d’abord qu’est-ce qui a fait que la gauche existe et se reconnaisse comme telle ? Deux éléments apparaissent immédiatement : d’une part, le fait de partager des réflexes similaires basés sur la primauté donnée à la justice et à l’égalité et, en conséquence, d’autre part, le fait de se retrouver du même côté de la barrière lors de moments décisifs. Mais ces deux éléments, pour importants qu’ils soient, auraient été insuffisants sans l’existence d’une convergence stratégique, plus ou moins explicite suivant les époques, entre les différentes forces de gauche et ce malgré le fait que le lien indéfectible du Parti communiste à l’URSS ait longtemps pesé lourd. Rappelons-nous la phrase de Guy Mollet : « Le parti communiste n’est ni à droite ni à gauche, il est à l’est ».
Cette convergence possible renvoie au projet social-démocrate. Si celui-ci se situe explicitement, ou de fait, dans le cadre du capitalisme, cela ne signifie pas qu’il est au service du capital tel que celui-ci existe à un moment donné. La social-démocratie vise à un compromis entre le travail et le capital. Elle vise donc à remettre en cause la domination de ce dernier et à limiter son emprise sur le monde du travail et sur la société. Le projet social-démocrate suppose donc un certain degré d’affrontement avec la logique capitaliste, avec comme objectif de borner l’activité du capital. D’où, par exemple la promotion des services publics et de la protection sociale. La social-démocratie est donc historiquement anti-libérale, même si in fine elle accepte le capitalisme. C’est ce rapport conflictuel au capital qui a permis que l’Union de la gauche puisse voir le jour. Cela permet aux courants radicaux, qui remettent en cause l’existence même du capitalisme, de pouvoir faire un bout de chemin avec les partis sociaux-démocrates et d’envisager des alliances avec eux.
La conversion dans les années 1980 de la social-démocratie au social-libéralisme change du tout au tout la situation. Ce dernier ne vise pas à bâtir un compromis entre le travail et le capital. Il s’agit au contraire pour lui d’accompagner, voire d’anticiper, les transformations du capitalisme globalisé. Les sociaux-libéraux partagent avec les néolibéraux un certain nombre d’idées fondamentales comme, par exemple, la croyance en l’efficience des marchés financiers dont il suffirait d’empêcher certaines dérives, ou encore la nécessaire baisse du coût du travail… En période « normale », ils essayent de pratiquer un aménagement social du néolibéralisme et cherchent à en atténuer un peu les conséquences sans le remettre en cause. En période de crise, ils appliquent sans hésiter des politiques d’austérité drastique.
Les conséquences du basculement de la social-démocratie vers le social-libéralisme sont très importantes. Il s’agissait auparavant pour les forces anticapitalistes de pousser la social-démocratie en la faisant aller plus loin et plus vite qu’elle ne l’aurait voulu. Aujourd’hui il paraît difficile de faire un bout de chemin avec elle, car nous ne sommes plus sur le même chemin. Les mouvements qui s’opposent au néolibéralisme ont donc du mal à passer des alliances politiques avec d’autres forces. Ainsi, malgré sa volonté, Syriza n’a pu passer aucune alliance avec les autres forces de gauche, ce qui l’a empêché d’arriver au pouvoir, et toute la social-démocratie européenne s’est félicitée de la victoire de la droite en Grèce. Certes, cette situation nourrit une crise larvée au sein des partis sociaux-démocrates et, la situation se détériorant, il n’est pas impossible que des ruptures voient le jour, comme cela s’est d’ailleurs déjà produit, ou que ces partis voient leur influence s’éroder sérieusement comme en Grèce.
Un autre élément important entre aujourd’hui en ligne de compte, ce qu’il est convenu d’appeler « la crise de la forme parti » qui renvoie à trois aspects : d’une part l’inefficacité de la lutte politique partidaire pour changer les choses ; d’autre part, le discrédit, qui a touché le stalinisme et la conception totalitaire du parti qui s’y rattache, n’a pas épargné les partis qui s’y sont opposés et qui, de plus, n’étaient pas totalement vaccinés contre cette conception ; enfin, et surtout, la montée de l’individualisme contemporain qui renvoie à une augmentation extraordinaire du niveau d’éducation, à la volonté d’être maître de son destin et à la remise en question des structures de domination. Cette crise prend des formes différentes suivant les pays et la France semble être, pour le moment, un peu moins touchée que d’autres, notamment l’Espagne ou le Portugal où les mouvements populaires considérables n’ont pas abouti, contrairement à la Grèce, à un changement d’échelle des forces de la gauche radicale.
Cette « crise de la forme parti » rend problématique une stratégie politique qui se déploierait essentiellement sur le terrain des rapports entre les partis. C’est à la société qu’il faut s’adresser avec une opposition radicale au néolibéralisme s’adossant à un projet de transformation sociale. Cela suppose, par exemple, pour une force politique comme le Front de gauche, de tisser des rapports nouveaux avec les mouvements sociaux et d’avoir un comportement modeste loin de toute tentative hégémonique.
Bonjour,
Locution nominale
Singulier Pluriel
parti politique partis politiques
/paʁ.ti pɔ.li.tik/
parti politique /paʁ.ti pɔ.li.tik/ masculin
(Politique) Organisation politique, regroupant des citoyens ayant une certaine idéologie ou certains idéaux en commun, et cherchant à obtenir le pouvoir dans le but de gouverner selon leurs principes.
Je révèlerai ici un secret bien connu et pourtant bien gardé (paradoxe de l’inconscient) : tout dirigeant d’un parti politique poursuit un intérêt personnel ; on peut le dire aussi comme ça : il n’y a pas de dirigeant d’un parti qui ne poursuive (pas) un intérêt personnel.
C’est un théorème de l’action politique, qui découle de l’expérience ; Platon a buté sur cette question ; nous en sommes toujours là.
Ce théorème est valable pour toutes les formations politiques : de droite, de gauche, d’extrême gauche, d’extrême droite, etc ...
Ce secret, que tout le bla bla des hommes politiques s’efforce d’habiller en sa version contraire : (je porte des idées, je veux servir la France, je fais don de ma personne à la France), ne dupe plus grand monde, tant les événements démontrent que les politiciens poursuivent une carrière et qu’ils entendent la rentabiliser en profits divers (financier, symbolique, etc...). Il est constant que cette vérité, que tout un chacun peut expérimenter, est toujours tue dans les prêches que l’on peut lire ici et là : il en va ainsi dans l’article de Pierre Khalfa. Dès lors toutes les grandes dissertations sur la démocratie sociale, les stratégies d’alliance, etc.., ont toujours un ressort comique qui semblent échapper à leur auteur : il en va ainsi dans l’article de Pierre Khalfa.
Je pense donc qu’il faut davantage s’interroger sur les stratégies de résistance populaire à l’injustice mise en oeuvre par les détenteurs du pouvoir, sachant que toute volonté de le prendre, ce pouvoir, repose forcément sur des motifs impurs. S.T.
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