Depuis l’élection de François Hollande au printemps 2012, le patronat n’a de cesse de rappeler le « coût » prohibitif du travail qui ne cesserait de monter en France et empêcherait notre économie d’être compétitive. Lors de l’ouverture de l’Université du Medef à la fin du mois d’août, Pierre Gattaz affichait : « Je n’ai qu’une seule obsession, c’est l’emploi, l’emploi, l’emploi. »
Pourtant, en dépit des derniers arbitrages rendus par le gouvernement concernant les régimes de retraites, il apparaît que ce sont les salariés qui ont perdu du pouvoir d’achat et que les patrons sont les grands gagnants des dernières réformes touchant au « coût du travail », entendons par là tous les prélèvements dont l’assiette est le salaire brut :
Gains ou pertes sur la base du salaire brut

La première décision du gouvernement a consisté à ne revenir que partiellement sur le relèvement de l’âge légal de droit à la retraite à 62 ans mis en place par le gouvernement Sarkozy. Cette mesure, qui n’est que justice, autorise les salariés ayant travaillé avant l’âge de 20 ans et ayant tous leurs trimestres à prendre leur retraite avant 60 ans. Elle a été financée par une augmentation des cotisations salariales comme patronales de 0,1 % dès 2012 allant vers 0,25 % en 2017. Alors que les salariés ont exclusivement fait les frais de toutes les « réformes » des retraites depuis plus de vingt ans, les voilà à nouveau mis à contribution.
A l’automne 2012, Louis Gallois, patron estampillé « de gauche », remet au gouvernement son rapport sur la compétitivité. Quelques jours avant, l’Association Française des Entreprises Privées, représentant les grosses entreprises cotées en bourse, demandait une baisse du « coût du travail d’au moins 30 milliards d’euros sur deux ans ». Message entendu cinq sur cinq par le gouvernement qui, moins de vingt-quatre heures après la publication du rapport, annonçait un Crédit d’Impôt pour la Compétitivité et l’Emploi (CICE) de 20 milliards dès 2013 puis 30 milliards dès 2014. Il s’agit d’un crédit d’impôt remboursable dont l’assiette est la masse des salaires bruts inférieurs à 2,5 fois le SMIC. Ce crédit d’impôt est de 4 % en 2013 et 6 % à partir de 2014.
La réforme des retraites qui a été présentée fin août 2013 prévoit de combler les déficits actuels par une augmentation des cotisations sociales, patronales comme salariales de 0,15 % en 2014, lesquelles seront ensuite relevées de 0,05 % tous les ans jusqu’en 2017. Commentaire immédiat de Pierre Gattaz, le nouveau patron du Medef : « Ces annonces marquent un renoncement à la croissance et à l’emploi ». Oublié le cadeau du CICE de 20 puis 30 milliards d’euros. Pierre Moscovici accoure immédiatement à l’Université du Medef qui se tient au même moment. Il s’engage alors en promettant que la hausse de cotisations liée à la réforme des retraites sera entièrement compensée par une baisse des cotisations pour la branche familles et ce, jusqu’à la fin du mandat de François Hollande. Il va encore au-delà en indiquant qu’une réflexion plus lourde s’ouvrira bientôt sur le financement de la branche famille pour trouver d’autres sources de financement que les cotisations patronales...
Coûteux retour à la case Sarkozy. Avant sa défaite, ce dernier avait justement annulé les cotisations sociales de la branche famille (5,4 % sur le salaire brut) au profit d’une hausse de la TVA. Cette réforme, qui n’a pas eu le temps d’être appliquée, a été annulée le lendemain de l’élection présidentielle. En échange, le gouvernement octroie le CICE pour un montant équivalent. Oublié le CICE ! Voilà maintenant que le patronat relance cette discussion et que le gouvernement semble abonder dans son sens. Belote, rebelote et dix de der !