Fred Sochard
Accueil > Société | Entretien par Catherine Tricot | 11 mai 2015

Alain Bertho : « Une islamisation de la révolte radicale »

Pour prendre la mesure des attentats de janvier et comprendre comment la révolte peut prendre de telles formes, Alain Bertho nous invite à appréhender le point de vue de leurs auteurs, et souligne l’absence actuelle de toute proposition de radicalité positive.

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Le récent essai d’Emmanuel Todd Qui est Charlie ? a déjà fait couler beaucoup d’encre. Alain Bertho part de prémisses proches des siennes. Mais son cheminement ultérieur diffère sensiblement.

Alain Bertho est anthropologue, directeur de la Maison des sciences de l’homme de Paris-Nord. Il travaille depuis dix ans sur les émeutes urbaines dans le monde. Entretien extrait de L’Enquête sur l’engagement des jeunes du numéro de printemps de Regards.

Regards. Comment avez-vous interprété les attaques terroristes du début d’année à Paris ?

Alain Bertho. Quelques jours après les attentats des 7 et 9 janvier, j’ai lu Underground. Dans ce livre basé essentiellement sur des entretiens, le romancier japonais Haruki Murakami tente de comprendre l’attaque meurtrière au gaz sarin perpétrée par la secte Aum dans le métro de Tokyo en 1995. Il a pour cela interrogé des victimes, dont il restitue les témoignages singuliers, et des membres de la secte. Son travail montre à quel point, dans ce genre de situations, deux expériences subjectives irréconciliables sont en concurrence sur le sens de l’événement : celle des victimes et celles des meurtriers. En réalité, l’expérience des victimes est celle d’un pourquoi sans réponse. La répétition en boucle des témoignages et de l’extrême douleur ne produit pas de sens. Cette expérience de souffrance physique et subjective est la matière première possible pour construire des énoncés sur la période qui s’ouvre. On l’a vu en janvier en France, on l’a revu à Tunis en mars. Quand « les mots ne suffisent plus », voire quand « il n’y a pas de mots » pour le dire, c’est que l’événement est au sens propre "impensable". C’est ce que nous montre Haruki Murakami dans les deux tiers de son livre consacrés aux passagers du métro dont la vie a été bouleversée, voire anéantie par l’attentat. Mais ce qui fait le sens de l’acte et assure sa continuité subjective avant, pendant et après, c’est ce que pensent ceux qui en ont été les acteurs ou auraient pu l’être. C’est ce qu’interroge Haruki Murakami en donnant la parole à des membres d’Aum. Il nous donne à lire une intellectualité en partage entre quelques assassins et de beaucoup plus paisibles Japonais au nom desquels les meurtres ont été commis. Il nous montre comment, si le passage à l’acte est toujours exceptionnel, il s’enracine dans une vision du monde et une expérience partagée. C’est l’élément qui nous manque aujourd’hui pour comprendre complètement les 7-8-9 janvier 2015.

« Nous n’avons pas affaire à un phénomène sectaire isolé ni à une "radicalisation de l’Islam" mais plutôt à une islamisation de la révolte radicale. »

Comment reconstituer, compléter le tableau ?

À notre tour, nous devons faire ce travail et comprendre le sens des meurtres de Paris. Notre subjectivité, et on peut le comprendre, s’y est refusée. Nous avons été sidérés, choqués. Pour faire le deuil de ce traumatisme, il a été nécessaire de construire un récit qui n’est pas celui des meurtriers. Mais malgré l’horreur que cela nous inspire, il faut pourtant comprendre le sens qu’ils ont donné à leur acte. Le qualificatif de terroriste est beaucoup trop général et générique. Nous avons affaire à la rencontre d’expériences personnelles et d’une figure contemporaine et mortifère de la révolte que la seule logique policière et militaire ne parviendra pas à anéantir. Les actes d’Amedy Coulibaly et des frères Kouachi, comme ceux de Mohammed Merah, viennent au terme d’histoires singulières, d’histoires françaises. Comme celles des quelque mille jeunes français partis en Syrie. Comme celle de ceux, bien plus nombreux, qui ne regardent pas forcément avec autant d’horreur que nous cette guerre annoncée contre l’occident corrupteur. De la même façon, les salafistes tunisiens dont sont issus les meurtriers du Bardo sont particulièrement bien implantés à Sidi Bouzid et Kasserine, dans le berceau de la révolution de décembre 2010-janvier 2011. Pire : nombre d’entre eux ont été les acteurs de cette révolution et n’étaient pas salafistes à l’époque.

Est-ce que des événements passés peuvent aider à comprendre ce qui s’enracine ici et maintenant ? Comment comprenez-vous la conversion à l’Islam de jeunes sans rapport aucun avec la culture arabe, parfois issus de milieux très engagés à gauche ?

Je pense qu’il nous faut comprendre que nous n’avons pas affaire à un phénomène sectaire isolé, et surtout que nous n’avons pas affaire à une "radicalisation de l’Islam", mais plutôt à une islamisation de la révolte radicale. Alors que les salafistes tunisiens actuels les plus actifs ne l’étaient pas lorsqu’ils étaient mobilisés contre Ben Ali, on sait que les candidats français au djihad sont bien souvent des convertis ou, à l’instar de Coulibaly et des frères Kouachi, des pratiquants tardifs. La vérité de leurs mobiles et de leur pensée ne doit pas tant être cherchée dans la théologie, de l’Islam en général ou du wahhabisme en particulier, mais bien dans la cohérence contemporaine des propositions politiques qu’ils portent. Si la confessionnalisation du monde et des affrontements est bien au cœur de ces propositions, ils sont loin d’en avoir le monopole aujourd’hui. Cette confessionnalisation en a mobilisé d’autres, en France ou ailleurs, dans la rue (la "Manif pour tous") comme dans les gouvernements. L’événement majeur qui nous a conduits là est sans aucun doute l’effondrement des États communistes et du communisme à la fin du 20e siècle et, de proche en proche, l’effondrement de la figure moderne de la politique qui faisait de la conquête du pouvoir le levier des transformations collectives. Nous avons perdu dans le même mouvement l’espoir révolutionnaire et le sens de la représentation élective. Nous avons perdu en même temps un certain rapport populaire et politique au temps historique, dans lequel le passé permettait de comprendre le présent et le présent de préparer l’avenir.

« Qu’est-ce qu’une révolte qui n’a plus ni avenir ni espoir ? Quand on a cela en tête, on comprend mieux la puissance subjective des propositions djihadistes. »

Quelles formes prend la rupture de ce lien ?

Pour toute une génération qui arrive aujourd’hui à l’âge adulte, une évidence s’impose : au bout du chemin emprunté par leurs parents, qu’ils aient immigré pour une vie meilleure, milité pour des lendemains qui chantent ou œuvré à leur propre "réussite", il y a une impasse. Plus d’espoir collectif de révolution ou de progrès social et peu d’espoir de réussite individuelle. Le compte à rebours de la planète semble commencé sans que rien n’arrête la course à la catastrophe. Avec la mondialisation financière, la vie publique est dominée par la corruption des États et le mensonge des gouvernements. Dans ces conditions, les valeurs de la République peuvent apparaître quelque peu désincarnées. La référence obsessionnelle à la mémoire s’est substituée à la réflexivité du récit historique. Et nous avons perdu le sens du passé parce que nous n’avons plus de subjectivité collective de l’avenir. Tout ceci, nous le savons peu ou prou. Mais il nous faut en réfléchir les articulations et les conséquences. Qu’est-ce qu’une révolte qui n’a plus ni avenir ni espoir ? Quand on a cela en tête, on comprend mieux la puissance subjective des propositions djihadistes. Le seul avenir proposé est la mort : celle « des mécréants, des juifs et des croisés » comme celle des martyres qui finiront au paradis en emmenant avec eux soixante-dix personnes. Quand on a cela en tête, on comprend mieux aussi la publicité faite par Daech autour des destructions des vestiges du passé et du patrimoine culturel. Si ce passé nous a menti sur notre avenir, il ne nous servirait plus qu’à mentir encore.

Le problème est que ce choix se tourne vers un islam des plus rétrogrades, des plus intrusifs…

En effet… Le salafisme, puisque c’est de lui qu’il s’agit, repose sur un sens donné à la vie qui ne laisse aucune place à la liberté. C’est l’islam dans une version des plus totalisantes. Un de ses attraits repose sur sa maîtrise de l’intime, la répression des désirs et des plaisirs, un cadre proposé pour tous les actes et les moments de la vie comme un acte de résistance au capitalisme et à « l’occident corrupteur ». Dans toute organisation de la révolte, il y a une figure de la libération possible et une contrainte de lutte, une discipline, et une éthique. Nous vivons l’effondrement des constructions qui ont associé ces deux dimensions à la fois libératrices et contraignantes. Le communisme a été au 20e siècle sa forme majeure. Il donnait sens à la souffrance, à la vie quotidienne en même temps qu’il proposait une subversion. Nous sommes toujours dans ce moment qui suit l’effondrement du communisme, mais aussi celui du tiers-mondisme. Le cycle politique des 19e et 20e siècles se clôt.

« Pendant ces dix dernières années, une génération s’est révoltée. Si rien ne semble bouger, comment s’étonner que certains décident de passer à la "phase 2" ? »

La demande ne s’exprime pas que sur le terrain spirituel ou religieux. Elle prend des formes politiques explicites, par exemple avec EI, l’État islamique.

Il y a une demande de politique et de cadre qui se retrouve dans le nom que se donne ce mouvement radical, l’État islamique. Il n’a rien d’un État au sens moderne du terme : il ne garantit ni la paix ni le respect de l’altérité. Il est au contraire entièrement fondé sur la guerre et le massacre de l’autre. Il n’est ni national ni territorial, mais à vocation universaliste et multi-situé avec le jeu des "allégeances" qui ne vont que se multiplier. Mais c’est une puissance de combat au service de cette radicalité mortifère, une puissance qui – à l’instar de la puissance malfaisante du Cinquième élément de Luc Besson – se renforce et gagne en influence quand on l’attaque.

Peut-on faire un parallèle entre l’extrême gauche hyperpolitisée passée au terrorisme dans les années 1970 et ces actes individuels sans revendication ?

L’effondrement de la catégorie d’avenir dont nous avons parlé, et que l’anthropologue Arjun Appadurai a mis au centre de son dernier livre The Future as Cultural Fact : Essays on the Global Condition, est sans doute une des dimensions de la vague émeutière qui a touché le monde entier depuis le début du siècle. Ces dernières années, cette vague a été prolongée par de grandes mobilisations collectives comme ce que l’on a appelé le printemps arabe, la mobilisation brésilienne contre la Coupe du monde, la mobilisation turque contre le projet urbain de la place Taksim… Nous venons de vivre une séquence mondiale d’affrontements entre les peuples et les pouvoirs, équivalente du "Printemps des peuples" de 1848, des révolutions communistes d’après la première guerre mondiale, de 1968. Il y a deux devenirs possibles à ses séquences : la construction d’une figure durable de la révolte et de l’espoir qui s’incarne dans des mouvements politiques organisés et des perspectives institutionnelles, ou la dérive vers le désespoir et la violence minoritaire. Après 1968, on a connu les Brigades rouges, la Bande à Baader, des dérives terroristes au Japon. Pendant ces dix dernières années, une génération s’est révoltée. Si rien ne semble bouger, comment s’étonner que certains décident de passer à la "phase 2" ? C’est l’expérience biographique des meurtriers de janvier. Le 17 septembre 2000, Amedy Coulibaly, qui a alors dix-huit ans, vole des motos avec un copain, Ali Rezgui, dix-neuf ans. Ils sont poursuivis par la police… qui tire, et Ali meurt dans ses bras sur un parking de Combs-la-Ville. Aucune enquête n’est ouverte sur la bavure. Cela provoque deux jours d’émeute à la Grande-Borne. Où sont aujourd’hui tous les acteurs des émeutes de 2005 ? Et tous ceux qui les ont regardés faire avec sympathie ? Comment regardent-ils la vie et la politique ? Quel regard ont-ils porté sur les événements de janvier ? On ne les a pas écoutés avant, ni pendant, ni après, ni depuis le 7 janvier. Le 8 au soir, je ne me suis pas rendu à la République, mais au rassemblement devant la mairie de Saint-Denis, ville où j’habite. J’ai rarement vu autant de monde, aussi ému. Mais en même temps, j’y ai rarement vu aussi peu "tout le monde". Il y avait certainement là tous les réseaux des militants. Mais si peu de gens ordinaires, d’inconnus, de gens et de jeunes "des quartiers", comme on dit. Pris dans notre émotion collective, avons-nous été attentifs au clivage silencieux qui était en train de prendre forme ?

« Les vraies valeurs d’une génération sont celles qu’elle se construit en retravaillant le passé à l’épreuve de sa propre expérience. La transmission n’y suffit pas. »

Comment avez-vous vécu la grande manifestation du 11 janvier ?

C’est un événement complexe. Je ne sais pas si nous avons déjà connu dans l’histoire une mobilisation aussi massive, construite sur du désarroi. Je l’ai un peu vécue comme une marche funèbre, l’enterrement de la génération de 68. C’est sur ce désarroi que l’État a pu construire un sens auquel il a donné un nom : "l’esprit du 11 janvier". Il y a dans l’expression "Je suis Charlie" au moins deux choses qu’il nous faut éclaircir. D’abord le "je" qui n’est pas d’emblée un "nous" sommes Charlie. Car le nous ne préexiste pas au désarroi, il se construit dans le partage de l’émotion et dans les rassemblements. C’est pourquoi il est idéologiquement plastique. Ensuite il y a Charlie. Car il y a eu trois catégories de victimes : les "mécréants" (Charlie), les juifs (l’Hypercacher) et les "croisés" (le policier du 11e arrondissement et la policière de Montrouge). Mohammed Merah s’en était déjà pris aux juifs et aux "croisés" sans susciter tant d’émotion. Et gageons que si Coulibaly avait agi seul et si les frères Kouachi n’avaient pas attaqué Charlie, la mobilisation n’aurait absolument pas été la même. Quelque chose s’est noué autour de l’attaque d’un journal peu connu et peu lu, devenu plus sûrement le symbole d’une liberté collective que ne l’aurait été peut-être un autre organe de presse ayant beaucoup plus pignon sur rue. C’est aussi à une butte témoin des années 60-70 que s’en sont pris, sans le savoir, les assassins, à des souvenirs d’enfance et de jeunesse, aux dernières traces d’une révolte juvénile d’un autre âge. Car pour une part, comme l’ont dit des collégiens à leurs enseignants, on a aussi assassiné des "papys". Mais une part du malentendu national est là. D’une certaine façon, une équipe héritière de mai 68 a mené jusqu’au bout des batailles devenues décalées par rapport aux enjeux d’aujourd’hui. Charlie a inscrit son irrévérence face à l’islam dans la lignée de son opposition aux églises et aux dogmes qui bloquent la libération de la société. Ils n’ont pas pris la mesure qu’en France au 21e siècle, s’en prendre ainsi à l’Islam, c’était aussi blesser les gens dominés dont c’était un point d’appui éthique pour faire face à la souffrance sociale.

"L’esprit du 11 janvier" n’a pas opéré sur vous…

Une fois encore, qui maîtrise le sens de l’événement ? Qui le construit ? C’est le pouvoir qui parle de "l’esprit du 11 janvier". Je le redis, le consensus de l’émotion s’est construit sur un non-dit. Les incidents autour de la minute de silence ont été révélateurs de ce non-dit. Et plutôt que d’entendre le malaise qui s’exprimait alors, ils ont été au sens propre "réduits au silence", soumis à l’opprobre général, voire judiciarisés. On est ainsi passé de l’émotion partagée à l’émotion obligatoire. Pense-t-on inculquer par autorité les valeurs de la République ? On sait bien, depuis au moins une génération, que ces valeurs sont aussi des promesses non tenues. L’obligation d’y adhérer est une violence de plus. L’une des grandes faiblesses du monde institutionnel est de penser que l’on peut répondre par les valeurs du passé, par la transmission. Les vraies valeurs d’une génération sont celles qu’elle se construit en retravaillant le passé à l’épreuve de sa propre expérience. La transmission n’y suffit pas. Le propre des valeurs est de donner un sens éthique à l’expérience. C’est hélas ce qui fait, pour certains, le sens du djihad et son attrait.

« La conversion au djihadisme est aujourd’hui une figure possible de la révolte. »

Quel rapport entre les djihadistes d’ici, qui partent en Syrie, et ceux qui ont contesté la minute de silence ?

Nous sommes face à des trajectoires subjectives diverses et pour une part disjointes. C’est une erreur grossière d’assimiler ceux qui ont contesté la minute de silence à des candidats au djihad, ou même à ses thuriféraires. Et même tous ceux qui partent en Syrie ne sont pas forcément voués au meurtre individuel. Il y a dans ce passage à l’acte ultime une part de décrochage irrationnel. Mais il y a un contexte, des vécus en écho sinon en partage. Comme à d’autres époques, ce contexte est aujourd’hui assez puissant pour polariser des décrochages psychiques, voire donner un sens contemporain à la folie. Pour les jeunes de la Grande Borne, Amédy Coulibaly est identifié comme "perché", autrement dit un peu cassé dans sa tête. De quel contexte subjectif est-il question ici ? Il s’agit d’une expérience en partage, un désarroi et une révolte face à un monde politique, médiatique, institutionnel qui ne prend pas en compte le malaise ou la souffrance d’une partie des classes populaires, qui les confessionnalise et les stigmatise. C’est plus que l’expérience d’une "exclusion" objective. C’est l’expérience collective d’une négation subjective. Ce qu’ils ressentent n’a pas d’existence officielle.

Quelles sont les conséquences de ce déni d’existence ?

Il ne faut pas sous-estimer les effets dévastateurs de cette expérience populaire : l’expérience du mensonge permanent des discours politiques et journalistiques à leur propre endroit. Cette expérience est destructrice des repères sur la notion même de vérité et alimente toutes les rumeurs et tous les complotismes dont se repaissent Alain Soral et ses amis. Si le "système" gouverne avec le mensonge, toute parole autorisée fut-elle scientifique peut être frappée du sceau du soupçon. D’autre part, la négation de la souffrance alimente toutes les mises en concurrence victimaires. De ce point de vue, l’influence de Dieudonné comme héro “anti-système” aurait dû être davantage regardée comme un symptôme plus global et pas une dérive morale solitaire. Mais l’indifférence générale à l’islamophobie a aussi ouvert la voie à un un renouveau antisémite bien au-delà de ceux qui en étaient les victimes. N’en déplaise au président du Crif, les profanateurs du cimetière de Sarre-Union en février n’étaient pas musulmans. Le résultat, aujourd’hui, est que si l’islamophobie progresse, l’antisémitisme aussi. En vis-à-vis de l’extrême droite officiellement islamophobe du FN, un terreau est aujourd’hui prêt pour une autre extrême droite, “révolutionnaire” comme on disait, populaire et antisémite. En vis-à-vis de l’extrême droite classiquement islamophobe du FN, un terreau est aujourd’hui prêt pour une autre extrême droite, "révolutionnaire" comme on disait, populaire et antisémite.

Et maintenant ?

Une période s’achève… La conversion au djihadisme est aujourd’hui une figure possible de la révolte. La réponse à ce drame n’est certainement pas une figure de l’ordre, fût-elle républicaine. La réponse viendra d’une figure alternative et contemporaine de la révolte, une révolte qui ne se place pas sur le terrain de la négation de l’avenir, de la négation du passé et de la haine de la pensée. Les deux questions clefs qui sont devant nous sont celle du possible et celle de la paix. « Podemos », nous dit le mouvement d’Iglesias en Espagne. Quand la financiarisation au pouvoir nous enferme dans des calculs de probabilités et de risques, il est urgent d’ouvrir des possibles sans lesquels l’avenir n’est qu’un mot creux. Et quand la guerre ou la menace de guerre (ou de terrorisme) tend à devenir un mode de gouvernement, il est temps de redonner un sens à une perspective de paix collective qui ne passe pas par une politique sécuritaire ni par des frappes aériennes un peu partout dans le monde. C’est peut-être aussi cela que nous ont dit les manifestants du 11 janvier. Je ne suis pas sûr qu’ils aient été bien entendus sur ce point.

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  • Démêler le bon grain de l’ivraie est plus que difficile dans cet interview car les deux y sont intimement à l’oeuvre, imbriqués dialectiquement. Tout y est, les vraies questions, nos insuffisances et les pistes pour avancer, communiquer, s’entendre plutôt que se haïr et s’entretuer et en même temps, le pire qui est d’honorer les saigneurs en qualifiant leur lâcheté assassine ( le massacre à l’arme automatique d’innocents aux mains nues à Paris, Tunis, en Irak, en Syrie et au Kurdistan) de révolte radicale alors qu’ils ne s’en prennent ni au capital, aux banques, à l’armée, aux politiciens à leur botte comme le faisait Action Directe et qu’en plus ils se revendiquent de l’Islam des pires capitalistes, esclavagistes milliardaires, lapideurs de femmes et d’homos, coupeurs de mains et de têtes , saoudiens et qataris, interlocuteurs privilégiés de la finance internationale.

    Fulgence Le 11 mai 2015 à 18:51
       
    • Il n’y a pas du tout de volonté d’"honorer les saigneurs" dans cet entretien d’Alain Bertho, il y a tentative d’EXPLIQUER les conditions de possibilité que de tels actes soient commis par tels types de personnes, sur le territoire français, qui se "révoltent", et dont on essaie de COMPRENDRE ce qui les motive à se révolter ainsi, en dehors d’autres figures de la Révolte telles qu’elles avaient été façonnées par les idées marxistes, communistes, anarchistes, libertaires...
      Si cette révolte informe ne s’attaque pas aux banques et au "Capital", c’est bien parce que les figures de la "révolution communiste" ont été défaites, et se sont souvent défaites aussi elles-mêmes, et qu’elles ont été englouties dans le néo-libéralisme.
      Ce que semble dire Bertho, si j’ai bien compris, c’est que ces "révoltés" qui expriment leur révolte sous la forme du salafisme, sont des groupes "aliénés", (même s’il faut discuter cette notion d’aliénation) sont, en tout cas, des groupes qui sont coupés de la forme communiste ou tiers-mondiste de la révolte, car ces deux formes ont donc été annihilées par l’idéologie néo-libérale qui est apparue dans les années 70/80.

      Il y a, dans cet entretien, une tentation de mise en perspective historique et sociologique.
      Il est vraiment temps d’arrêter de dire que les tentatives d’expliquer un fait, sont des "excuses".
      Il est temps aussi de s’arrêter de ne penser qu’ en terme de "responsabilité individuelle" en faisant fi de toutes les déterminations historiques, sociologiques et anthropologiques.
      Cette confusion est une catastrophe intellectuelle et éthique.
      Le point de vue d’Alain Bertho est au contraire constructif.
      Là où je suis peut-être juste un peu moins d’accord, c’est sur le fait qu’il n’y a pas du tout de relais entre la forme historique antérieure de la révolte et une autre, récente, plus "actualisée".
      Il ne s’agit pas de dire qu’il y a "évolution"linéaire de la forme communiste de la révolte, mais il semble quand même y avoir un continuum, avec changements et réajustements, à travers notamment de nombreux mouvements de critique sociale prenant davantage en compte l’aspect écologique par exemple, peaufinant le vocabulaire, tentant de reformuler les choses... Il n’y a quand même pas rien entre la "forme communiste en déclin" et l’ "islamisation radicale de la révolte"... On peut quand même voir émerger beaucoup d’expérimentations critiques qui ne sont pas que des phénomènes "bourgeois" ou "bobos" ou que sais-je ?!... On entend ci et là des discours critiques qui peut-être essaient encore de créer des synthèses qui tiennent la route, et réussiront à se faire entendre lorsque le discours sera mieux rodé... Il s’agirait aussi qu’ils soient davantage relayés par les médias "importants"...
      il n’est pas impossible d’orienter la révolte informe de certains (jeunes ou moins jeunes) vers de la pensée critique de bonne qualité, en dehors donc des "salafismeries", "dieudonneries", "soraleries" ou "front-nationaleries"...
      Mais ça demande du travail, et de la résistance aux nombreuses injonctions et séductions de l’Ordre néo-libéral.

      Aurélien I. Le 12 mai 2015 à 15:02
  •  
  • Un "libre-penseur" vient encore d’être assassiné par Al-Qaida, au Bangladesh. Et ça continue.. Concernant les voyous mécréants de Charlie dont on répète en boucle qu’ils ont humilié les musulmans, je pense sincèrement que s’ils l’ont fait, ce n’était pas pour se moquer de TOUS les musulmans. CH était un petit journal iconoclaste qui s’indignait lorsque des excités utilisaient la terreur et la menace pour censurer des films ou des journaux, même mauvais et contraires à leurs idées. Pour eux, c’est le droit qui doit surveiller les actes culturels, et non la violence et la menace. Je pense qu’ils avaient raison, sur le fond. Il ne faut pas oublier une autre chose importante : là ou l’islamophobie, parfois très intégrée, est la plus forte et la plus prégnante, c’est précisément dans les pays ou les intégristes islamistes sont ( ou ont été ) au pouvoir. Beaucoup de pauvres gens sont terrifiés, ne les oublions pas. Une dernière chose : si les opprimés et les dominés veulent espérer s’émanciper un jour, je pense qu’ils feraient bien de remettre un peu en question leurs religions, leurs dogmes, leurs représentants et leurs intermédiaires ( les illusions religieuses permettent de garder les opprimés au fond leurs cages, les capitalistes le savent bien ). Tiens, je leur propose de s’abonner à Charlie-Hebdo, au moment de l’adolescence : au début, ça fait un peu mal, mais au bout du compte, c’est trés libérateur !!

    Bakou Le 12 mai 2015 à 13:16
  •  
  • Faut quand même dire que l’analyse proposée semble bcp plus en accord avec la réalité que celle que nous donne un Todd. Parce-que franchement, l’Islamophobie, la haine des musulmans, je ne les ai pas beaucoup vu, lors de la grande manif, et pourtant, je la craignais beaucoup. Si ça avait été un journal comme Le Figaro ou Minute qui avaient été touchés, je pense que les pancartes racistes auraient été de sortie, et en grand nombre . Difficile pour des sympathisants FN ou des identitaires de descendre dans la rue aprés la mort de mecs comme Charb, Cabu et Wolinski, pas forcément les meilleurs représentants du bon vieil Ordre national et chrétien..

    Bakou Le 12 mai 2015 à 18:35
       
    • @ Bakou
      Tout à fait d’accord avec toi, j’y étais et ne suis pas près d’oublier la consternation, la détermination et la fraternité face cette froide barbarie qui frappe sauvagement tout ce qui est humain, athées, chrétiens, juifs, sunnites et chiites au même titre.

      Fulgence Le 12 mai 2015 à 19:34
  •  
  • Vous vous trompez tous Alain Bertho, Maurice .... Il n’y a aucune révolte dans tout ça. Il y a le 11 janvier 2015 la mise en éxecution d’une sentence prononcée par un tribunal islamique dans un pays lointain. Aucune révolte, aucune rébellion. De la rigueur, de la rationalité dans la science islamique.

    totoLeGrand Le 14 mai 2015 à 02:14
  •  
  • Maurice, vous n’êtes pas seul à penser que : "
    Pour ma part, je subis évidemment, faute de mieux, cet état d’attente, cette angoisse de l’avenir, de déroute de l’action transformatrice. Mais j’ai de la peine à rester l’arme au pied… Je cherche (désespérément !) une voie, évidemment pour combattre mon désarroi personnel. Mais aussi pour surmonter avec d’autres l’attentisme, car je suis persuadé que celui-ci a besoin de confrontations autres que simplement verbales. Car, de l’autre côté, ce n’est pas l’attentisme qui prévaut mais un combat (de classe) qui accumule au jour le jour des avancées, des points d’ancrage, rendant de plus en plus difficile, non seulement un retour en arrière, mais l’adoption d’une bifurcation favorable.
    En somme, ce que je crois nécessaire pour ne pas sombrer, c’est, faute de mieux, de tenter une « expérience politique » d’envergure. En la poursuivant, ou bien on progressera et l’expérience fera « boule de neige » et ainsi, dynamisée, conduira à quelque chose d’utile et de nouveau, ou bien échouera… et on tentera une nouvelle expérience. Dans tous les cas, on fera de la « veille active », on maintiendra vivant un flambeau de transformation sociale, de « révolution », qui est une autre façon, plus solide que le débat académique, fut-il remarquable, d’ancrer dans les têtes des démarches crédibles, et la volonté de se battre.
    Evidemment, il ne s’agit pas de faire n’importe quoi au prétexte qu’on expérimente et que, dès lors, échouer, n’est pas si grave et apprend toujours quelque chose. La société n’est pas un laboratoire « d’essais et d’erreurs » désordonnés, qu’on a tout loisir ensuite de passer au crible, pour sélectionner la bonne solution. L’expérience soviétique, qui a échouée au sens strict, a duré 70 ans ; l’expérience chinoise n’a pas encore dit son dernier mot. Une expérience politique digne de ce nom a besoin de temps, et ce temps qui s’écoule modifie les conditions initiales : on ne peut pas faire deux fois la même chose, et certaines opportunités ne se présentent pas deux fois. Il faut donc s’engager dans une expérience longuement pensée, dans le court, moyen et long terme. Autrement dit, s’engager dans l’expérience qui, aujourd’hui, rassemble le maximum d’atouts… et advienne que pourra. Dernière expression qui ne veut pas dire non plus qu’on fonce tête baissée : à chaque étape on devra analyser l’acquis, et corriger en conséquence. On fera du « retour d’expérience », de la prospective, de l’autocritique, en continu…
    Alors, quelle expérience envisager ?
    Je ne prétends pas décrire l’affaire par le menu, mais proposer quelques idées qui me paraissent utiles dans le but proposé.
    1) Je ne crois pas que dans un pays « avancé » comme la France, dans l’environnement qui est le sien (Europe), une « révolution violente »soit à l’ordre du jour, même à l’issue d’un mouvement plus ou moins spontané du type de mai 68, ou de certaines révolutions arabes. Ou, plus exactement, une telle éventualité n’est pas à planifier, comme schéma de l’expérience envisagée. Si elle survient, on adaptera l’expérience au contexte… et plus on aura « travaillé » le projet, plus on sera à même de prendre le train en marche d’un mouvement social impromptu, et de ses aléas…
    2) Je pense qu’il faut tabler sur une « révolution citoyenne ». Je donne à ce concept la signification suivante : une prise du pouvoir d’état par les urnes, via une force politique décidée à tenter l’expérience. Ce qui implique qu’un électorat majoritaire acquis à l’expérience s’est constitué et la soutient fermement. Ce qui implique à son tour qu’on est entré, dans le pays, dans une période de mouvements sociaux puissants et impérieux. J’imagine quelque chose comme 1936 : un succès électoral dû à un large mouvement social et la mise en oeuvre de ce projet au niveau gouvernemental, toujours appuyée sur le mouvement social. Car le second terme a contribué à la définition du premier et tente de veiller à son application (il y a dans l’affaire grecque actuelle une esquisse d’un tel processus).
    3) Quelle force politique ? C’est évidemment la grande question !
    Je pense qu’elle ne peut être appuyée au départ que sur des partis politiques représentatifs de ces classes « opprimées » : a) un parti politique émanant pour l’essentiel des couches populaires, et porteur de leurs revendications : en somme un « parti de la classe ouvrière » ou des « classes populaires ». Sous cette forme, l’histoire montre qu’il ne peut être efficace qu’en s’inspirant de Marx (et évidemment de ses continuateurs, notamment pour être en phase avec le présent). C’est tout au moins le constat que je fais à partir de l’histoire « du court 20ème Siècle ». Si l’on regarde « l’offre politique » disponible à cet égard, il ne peut s’agir que du PCF… tout au moins s’il ne s’efface pas davantage, au point de disparaître pratiquement. Dans ce cas, il faudra en réinventer un !"

    Passeur Le 14 mai 2015 à 02:38
  •  
  • Admettons qu’il n’y ait pas de plan b) et qu’il n’y ait qu’une seule bifurcation favorable possible : celle où nous ne disparaissons pas. La question devient "Est-il urgent de réinventer une force politique capable de mener l’expérience d’un nouveau rapport aux autres et au monde ? Ou bien pouvons-nous attendre ?" Imaginons alors que "le pays soit réellement entré dans une période de mouvements sociaux puissants et impérieux." Ou qu’il soit en phase de l’être. Votre analyse et votre projet prend alors un sens plus..révolutionnaire (ou djihadiste, c’est exactement la même chose en fait) : le peuple -chacun d’entre nous - se lève pour dire "stop", pour réclamer la justice pour tous et pour retrouver un peu de sagesse dans la gestion de notre pauvre monde, nous n’en n’avons qu’un il ne faut pas l’oublier. Pour se battre quoi, merde et plus seulement pour s’indigner ! Ca suffit ! Mais se battre contre quoi ? Où est l’ennemi ? Là bas dehors, loin, inconnu ? Ou bien ici, près de chez nous, familier ? Est-il bien sage de supposer que notre ennemi puisse être cette religion qui est naît il y a 1300 ans de l’autre côté de la méditerranée, réclamant le retour à l’unité et la logique (Allah, Sourate Al Iklas) après 7 siècles d’Evangiles plurielles et de monothéisme tripartite ; mais se soumettant (Islam) fondamentalement au même principe que le christianisme (l’amour de son prochain) ? L’ennemi ne vient-il pas plutôt de nous-mêmes ? De nous-mêmes qui créons nos propres petits kamikazes, des enfants qui sont nés chez nous, sur nos terres, et qui viennent cracher leur haine sur nos tombes et sur nos symboles. Pourquoi cela ? Peut-être est-il encore temps d’arrêter l’emballement ? De prévenir que ce mouvement puissant qui frémit peut-être sous nos pieds, prêt à se déchainer à la moindre injustice trop injuste, ne se déchaîne justement ? Par quoi est-il entretenu ? Il me semble qu’il est précisément entretenu par la désagréable manie qu’ont les Charlie de parler à la place des autres alors qu’ils ne savent pas eux-mêmes qui ils sont. Par exemple, les Charlie disent ça "Je pense qu’il nous faut comprendre que nous n’avons pas affaire à un phénomène sectaire isolé, et surtout que nous n’avons pas affaire à une "radicalisation de l’Islam", mais plutôt à une islamisation de la révolte radicale." Bon, alors je ne dis pas que les Charlie sont des ennemis. Je dis que l’ennemi est en chacun de nous chaque fois que nous nous mettons à penser ainsi. C’est une impasse. Une perte de temps. La réflexion ne mène à rien et s’expose à sa propre critique : l’absence de proposition positive. Avant de parler des autres, de ce qu’ils sont et de ce qu’ils ne sont pas, il faut savoir qui on est. Si tout le monde respectait ça, le risque d’une Révolution djihadiste ou d’un Djihad Revolutionnaire s’éloignerait considérablement je pense. Bon voilà Maurice, vous n’êtes pas seul. Parole, on est au moins deux ! :)

    Passeur Le 14 mai 2015 à 03:36
  •  
  • Bonjour totoLeGrand,

    Je n’ai pas dit que je faisais de ce problème (lequel ?) un problème purement social. Je ne pense pas que ce soit faux de dire qu’il y a un problème social aujourd’hui. Mais c’est au mieux insuffisant ; au pire tautologique. Le problème qui se pose à moi est métaphysique (bien plus que social, politique ou économique). Si je me suis permis d’intervenir dans ce dialogue, c’est parce que j’ai été saisi par la formulation qu’en donne Maurice au détour de son texte :

    "Pour ma part, je subis évidemment, faute de mieux, cet état d’attente, cette angoisse de l’avenir, de déroute de l’action transformatrice. Mais j’ai de la peine à rester l’arme au pied… Je cherche (désespérément !) une voie, évidemment pour combattre mon désarroi personnel. Mais aussi pour surmonter avec d’autres l’attentisme, car je suis persuadé que celui-ci a besoin de confrontations autres que simplement verbales. Car, de l’autre côté, ce n’est pas l’attentisme qui prévaut mais un combat (de classe) qui accumule au jour le jour des avancées, des points d’ancrage, rendant de plus en plus difficile, non seulement un retour en arrière, mais l’adoption d’une bifurcation favorable. "

    Voilà. Je partage ça avec Maurice.

    Et toi, totoLegrand, n’as-tu pas toi aussi l’impression que les choses vacillent, que les vieilles certitudes ne tiennent plus qu’à un fil et qu’il ne faudrait peut-être pas grand chose pour que tout foute le camp ? N’as-tu pas cette "angoisse de l’avenir, ce sentiment de déroute " ? N’as-tu pas de plus en plus de peine à "rester l’arme au pied" ? N’as-tu pas envie de dire stop ? N’es-tu pas indigné par certaines choses toi aussi et n’as-tu pas l’impression que le temps de l’indignation est derrière nous ? Ne vois-tu pas qu’après l’indignation, il n’y a pas 10 000 autres étapes : tu baisses la culotte ou tu vas à la baston et tant pis si tu crèves parce que de toute façon, ya basta, c’est plus possible comme ça ? Tu te lèves et tu lèves les armes. Et le sang et les larmes couleront dans nos sillons. Ca s’appelle Révolution ou Djihad, Printemps arabe ou printemps d’érable, dans tous les cas, ça commence toujours par des courants "puissants et impérieux" (j’adore cette expression de Maurice !) qui se forment en dessous des apparences des choses et qui d’un coup se déchaînent jusqu’à ce qu’il ne reste que les seules choses auxquelles nous tenons vraiment (en plus de nous-mêmes).

    Bon, on est d’accord qu’on préfèrerait éviter ça. Perso le sang, c’est pas mon truc et les armes non plus. Mais je les lèverai, la rage au coeur, parce que je sais qui je suis et parce que ce que je suis ne peux pas être dans ce monde où tout est de travers. Alors que faire ?

    Ces mouvements ne peuvent être contenus ou évacués en quelques jeux de mots. Dire qu’il y a radicalisation de l’Islam, c’est clairement passer à côté de cette dimension proprement anthropologique du problème. Nous sommes à une bifurcation de l’histoire et notre pays est au coeur du cyclone. Comment les Charlie vont-ils s’en sortir tout nigauds qu’ils sont avec leurs vieilles valeurs qu’ils ne respectent même plus ? Ils défilent par millions pour la liberté d’expression en compagnie des pires oppresseurs de cette même liberté et ils se donnent bonne conscience en blasphémant les Dieux de ces mêmes oppresseurs, bien tranquilles derrière leurs lois laïques. Pour moi, ça a du sens de blasphémer quand la religion m’opprime moi. Et je n’ai pas à blasphémer à la place de celles et ceux que cette religion oppriment éventuellement. Je peux les protéger s’ils choisissent de le faire. Mais je n’ai pas à le faire à leur place. Or, c’est ce que les Charlie font en permanence. Ils confondent la défense de leur idéal (la liberté d’expression) avec la défense de la satire de leur contre idéal (l’intolérance). Il faut arrêter de faire ça les mecs, ça sert à rien. Et c’est carrément inapproprié dans l’hypothèse où nous sommes face à une bifurcation du genre de celle que nous décrit Maurice, c’est à dire une bifurcation entre tout et rien, entre survivre et disparaître.

    Voilà ce que je pense. Je peux me tromper. J’espère me tromper en fait. De tout coeur. Crois-moi toto. Moi, mes armes, c’est les mots. Les autres armes, elles me font peur, je préfère les laisser ranger. Mais pour vaincre ma coeur, j’ai un vieux truc, une vielle chanson, une vieille chanson que tu connais sans doute :

    "Frappez des mains sur les cuisses
    Que vos poitrines soufflent
    Pliez les genoux
    Laissez vos hanches suivre le rythme
    Tapez des pieds aussi fort que vous pouvez
    C’est la mort ! C’est la mort !
    C’est la vie ! C’est la vie !
    Voici l’homme poilu
    Qui est allé chercher le soleil, et l’a fait briller de nouveau
    Faites face ! Faites face en rang !
    Faites face ! Faites face en rang !
    Soyez solides et rapides devant le soleil qui brille !"

    Passeur Le 14 mai 2015 à 16:57
  •  
  • Oui, je suis aussi dans l’angoisse. Comme beaucoup de gens. Angoisse car nous vivons clairement une époque de grandes mutations (mondialisation, grandes migrations, islamisation). Mais pour moi aussi, l’avancée ne peut se faire que dans la réforme et non la violence.
    Je ne crois pas au communisme. La vraie définition du communisme, c’est l’étatisation de tous les moyens de production. Ce système a montré son inefficacité économique sociale et sa dangerosité humaine. Je me méfie du multiculturalisme. L’histoire nous a aussi montré qu’il finissait en boucherie. Je n’ai pas de solutions. L’histoire n’est jamais écrite à l’avance.

    totoLeGrand Le 14 mai 2015 à 17:17
  •  
  • Heu, Maurice, TotoLegrand, vous êtes au 36 millième degré ou quoi là ? Je ne vous suis plus. J’ai lâché à "Il me semble que les choses ont bien été précisées au congrès de Tours en 1920, ou je n’ai pas tout compris." (TotoLegrand).

    Pour moi, on est en 2015. C’est pas un rêve. C’est peut-être une illusion. Mais vu qu’il n’y en a pas d’autre, elle est "vraie". Là, en ce moment, vous et moi, nous nous parlons. La connaissance que nous avons les uns des autres n’est ni plus réelle ou virtuelle, vraie ou fausse, matérielle ou idéelle que celle que nous avons de notre voisin (par exemple) ou de notre président de la république. Vous êtes peut-être des logiciels automatiques de production de discours sur les forums ou des agents de la CIA. Ce sont des questions indécidables. Toujours est-il que nous nous parlons.

    Donc on est en 2015. Et nous nous parlons vous et moi : Maurice, totoLegrand et Passeur. Qu’est-ce qu’on fait ?

    Ok, je suis d’accord, c’est bien d’avoir lu ce qu’on écrit les mecs avant nous (moise, mahomet, descartes, marx...), ça peut aider. Y’a plein de bonnes idées qu’on peut adapter. Rien de certain cependant. Des trucs qui marchent ici ou là, à la louche et qu’on a du mal à qualifier rigoureusement (les religions, l’état, la démocratie, la république, le marché, les droits de l’homme, le capitalisme, le communisme).

    Et puis c’était avant. Ce n’était pas aujourd’hui. Ce qui se passe aujourd’hui, comme le dit Maurice, c’est à nous de l’écrire. Et la seule chose dont on est sûr, c’est qu’aucun de nos prédécesseurs n’a affronté les mêmes problèmes que nous et qu’aucune de leurs solutions ne marchera donc telle quelle.

    Donc on peut essayer à peu près tout ce qu’on veut, ca a autant de chance de marcher que ce qui a été tenté avant. Par contre, ca ne sert à rien de jeter ce qui marche encore hein ? L’économie de marché, la notion de profit et l’idée d’une monnaie régalienne sont en train de disparaître sous nos yeux. Elles ont eut des défauts mais ont été bien utiles en leur temps. Et elles peuvent encore nous servir quelques décennies si nous savons les ménager. Et ce n’est pas parce que nous les avons laissé devenir nos maîtres pendant 3 siècles qu’il faut les conspuer plus que de raison aujourd’hui.

    Aujourd’hui donc, vous et moi, on est en 2015. Et ?

    TotoLegrand, je ne sais pas merde, fais-moi rêver. Pourquoi tu t’appelles totoLegrand si c’est pour dire "Ca m’angoisse aussi, j’ai pas envie de me battre non plus, mais je n’ai pas de solution." ? Maurice il dit ça pareil mais il s’appelle Maurice. Pas totoLegrand.

    Moi non plus je n’ai pas de solution à long terme. A défaut, je pratique le self defense intellectuelle contre la confusion ambiante, cette même confusion qui rend dangereux les mouvements puissants et impérieux en cours. Et j’essaye d’en faire passer les bases. Mais, je suis Passeur. Pas totoLegrand.

    Là, ici maintenant, TotoLegrand, c’est toi.

    On ne te connait pas. Tu peux tout dire. Tu peux aussi te retirer. On ne se croisera sans doute jamais plus. Alors vas-y, lâches-toi mec, dis-nous un truc positif !! Même si t’y crois qu’à moitié.

    Passeur Le 14 mai 2015 à 23:27
  •  
  • Essayes, TotoLegrand, de ne pas faire comme Alain Bertho qui,

    "Pour prendre la mesure des attentats de janvier et comprendre comment la révolte peut prendre de telles formes, Alain Bertho nous invite à appréhender le point de vue de leurs auteurs, et souligne l’absence actuelle de toute proposition de radicalité positive." (résumé de l’interview)

    Essayes totoLegrand de ne pas dire des choses telles que "un révolté qui fait attentat ne propose rien de positif". On s’en serait douté !!!!

    T’es où Alain d’ailleurs ? On parle, on parle sur ton article, mais t’en penses quoi toi ? J’y mets les formes, mais je suis quand même en train de dire que ton article est une pure tautologie. Qu’il n’apporte rien donc. Or je suis sûr que tu l’as écrit avec de nobles intentions. Il y a de beaux passages d’ailleurs. Mais tu parles de l’Islam. Est-ce que tu as lu le Coran ? Es-tu capable de réciter ne serait-ce qu’une seule sourate ? (Ou un verset de la Bible ? On un axiome marxiste ?).

    N’as-tu rien d’autre à nous dire ? N’y a-t-il pas des choses auxquelles tu tiens, que tu crois vraies mais sur lesquelles tu as des doutes et sur lesquelles tu voudrais échanger avec nous ? De quoi tu veux nous parler finalement ? Peut-être que nous t’avons mal compris en fait ? Y’a que toi qui peux nous le dire en fait.

    Passeur Le 14 mai 2015 à 23:50
  •  
  • Enfin ! J’attendais un texte comme celui-ci ... plus j’y ai pensé plus je me disais que les jeunes des milieux populaires d’origine immigrée ont été privés de toute possibilité d’exprimer leur révolte ....par la génération 68 culturellement dominante
    , . Nos chers antitotalitaires ... ces petits bourgeois qui se pensaient si brillants qu’ils ont été vexés de s’être trompés sur les régimes maoistes et n’ont plus jamais cessés de ricaner haineusement de toute forme de révolte collective.

    Les "antitoches" - bien plus que la droite dont on n’a jamas rien attendu - sont coupables de toutes les dérives des jeunes Français, auxquels ils n’ont laissé que la consommation, les raves, la drogue, l’alcool, l’obsession sportive et la religiosité ...

    Ces intellectuels prétendument de gauche ont d’ailleurs été bien récompensés de leur travail incessant de propagande ... ce sont majoritairement eux qui trônent dans les médias et qui font le tri pour le droit de parole.

    se comportant comme les staliniens qu’ils ont éliminés (attaque en meute, dénonciations, calomnies, etc.) étouffant toute pensée qui n’était pas la leur

    Bob Le 15 mai 2015 à 09:32
  •  
  • Franchement, il n’a pas de mal à confesser un désarroi idéologique... Alain Badiou dit : « désorientation »... Ce qui est problématique c’est le réflexe pavlovien qui consiste à ne pas être capable d’attendre une demi-seconde, afin d’immédiatement COMBLER celui-ci par du foin de(non)pensée... « Nous » (si je puis dire ici « nous » !!!...) risquons même de prendre prétexte de notre manque-à-savoir pour y répondre par du FUMIER idéologique... C’est ce qui se passe plus ou moins immanquablement dans les temps troublés... ...Et l’on ne réplique pas à ce fumier dans une langue de cuir bouilli !... Mais par le TRANCHANT de la langue !....
    Monsieur le Toto, qui, traciste caméléon (un traciste caméléon est un caméléon qui laisse des traces...), ...entré par la petite porte sur un site de vraie gauche pour s’y adapter à sa manière, ...qui fait l’âne pour avoir du son, ...qui JOUE à celui qui n’aurait qu’un QI de pou, agrandi... aux proportions humaines, est par exemple quelqu’un qui aime, en l’occurrence,... les proportions, qui ...chérit « LES STATISTIQUES » et les classements... Voici ce qu’il a écrit sous un autre article (« Le paternalisme lubrique reste difficile à déjouer ») : « ...chaque directeur d’école a besoin de savoir combien de repas sans porc il doit servir à la cantine. Aussi ces statistiques ethniques qui sont visiblement pratiquées partout, ne peuvent émouvoir que les Cassandres de la République, les bigotes de la bien-pensance, et surtout les enfumeurs de la réalité. » (totoLeGrand Le 17 mai à 21:45)...
    Sa désorientation est en réalité très orientée : « Oui, je suis aussi dans l’angoisse. Comme beaucoup de gens. Angoisse car nous vivons clairement une époque de grandes mutations (mondialisation, grandes migrations, islamisation). »
    A quoi il ajoute : « Mais pour moi aussi, l’avancée ne peut se faire que dans la réforme et non la violence. ...Je ne crois pas au communisme. La vraie définition du communisme, c’est l’étatisation de tous les moyens de production. Ce système a montré son inefficacité économique sociale et sa dangerosité humaine. »
    Et aussi : « Je me méfie du multiculturalisme. L’histoire nous a aussi montré qu’il finissait en boucherie. Je n’ai pas de solutions. L’histoire n’est jamais écrite à l’avance. » (totoLeGrand Le 14 mai à 17:17)...
    Il a aussi écrit ceci, à propos du communisme : « ...quelle est la différence avec le socialisme. Je ne comprends réellement pas. S’il n’y a pas de collectivisation des moyens de production, je ne comprends plus. Je suis prêt à entendre toute explication, qui pourrait me faire progresser. » (totoLeGrand Le 15 mai à 01:14)...
    ...Eh bien, à votre service, Monsieur le Toto, si vous vouliez vous donner la peine de comprendre ce que mille écrits, établissent, à commencer par ceux de Marx, et aussi mille pratiques sociales : que, contrairement à ce en quoi il s’est figé, le communisme N’EST PAS UN ETAT NI MÊME UN IDEAL DEVANT LEQUEL SE PROSTERNER, MAIS UN MOUVEMENT : CELUI PAR LEQUEL LE DESORDRE CAPITALISTE ETABLI PEUT ETRE SURMONTE !...
    C’est essentiellement une QUALITE NOUVELLE de vie... Ainsi faut-il comprendre la mise en place d’une SECURISATION SOCIALE GENERALISEE non pas d’abord comme une question de Justice et de répartition, mais de LIBERTE : le modèle social français, auquel un certain Denis Kessler s’est fait connaître pour avoir donné le signal de sa soi-disant nécessaire extermination... est synonyme d’une qualité de vie POUR TOUS, à partir déjà d’un égal accès aux soins, à partir d’une contribution proportionnelle aux moyens de chacun... Eh oui, c’est déjà du communisme, au sein même du capitalisme !...
    Il s’agirait de pousser la logique anticapitaliste bien plus loin : car le problème de la planète, où le processus inégalitaire n’a jamais été aussi exorbitant, ce n’est pas simplement un problème de gâchis de richesses, du à leur mauvaise répartition !... C’est bien plus profond que cela : car il s’agit d’une MASSIVE INVALIDATION DES POTENTIELS HUMAINS A RESOUDRE LES PROBLEMES PLANETAIRES, ALORS QUE L’HUMANITE AURAIT DESORMAIS TOUS LES OUTILS EN MAIN POUR LE FAIRE !... Il est, dès lors impossible d’opposer « socialisme » bien compris, dans le sens d’une « meilleure répartition des richesses » (ce sur quoi un livre, par exemple, comme celui de Thomas Piketti semble mettre l’accent...), et... modification des RAPPORTS SOCIAUX !... Autrement dit la question quantitative à la question qualitative...
    (Suite du cours à venir...)

    Aubert Sikirdji Le 18 mai 2015 à 14:08
       
    • ...Correction de ma première phrase :
      "Franchement, il n’y a pas de mal à confesser un désarroi idéologique... "

      Aubert Sikirdji Le 18 mai 2015 à 14:09
  •  
  • "on sait que les candidats français au djihad sont bien souvent des convertis "

    Non on ne sait pas du tout. Car comme le dit Dounia Bouzar si les appels proviennent majoritairement de familles de convertis c’est parce que les familles musulmanes hésitent à appeler le centre. Mais en Syrie ce ne sont pas. la majorité en tout cas selon plusieurs sources concordantes Encore une fois on construit des argumentations sur la base de données imprécises pour valider sa propre argumentation.

    Gillo Le 20 mai 2015 à 03:28
  •  
  • Remarquable analyse, à la fois modeste et fine, ce que n’a pas été le coup de com’ de Todd.

    PMB Le 29 juin 2015 à 13:26
  •  
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