Né le 9 octobre 1985 à Logroño, fils d’un professeur d’histoire-géographie et d’une pharmacienne, Alberto Garzon a deux passions : l’informatique et le football – il essayera d’intégrer le club du Deportivo Rincon, sans succès. Dans sa famille, on parle politique, on est de gauche sans s’engager dans un parti. Bercé par cet univers, par les jeux vidéo de stratégie ou encore par Le seigneur des anneaux, très jeune, Garzon rejoint l’Union des jeunesses communistes, puis le Parti communiste espagnol.
Un économiste chez les Indignés
Timide mais charismatique, comme le décrivent ses parents, Alberto Garzon a toujours eu l’étoffe d’un leader. À l’âge de dix-huit ans, il intègre Izquierda unida (IU). Contre toute attente, il décide de faire des études d’économie à l’université de Malaga. Cette approche économique de la politique fera sa force. En 2004, il est président de l’association des étudiants pour une économie critique, avant de rejoindre le département d’Économie de l’université Complutense de Madrid.
Puis le 15-M est venu bouleverser l’Espagne. Garzon est très impliqué dans ce qui sera appelé le mouvement des Indignés. C’est en son sein qu’il se fait remarquer du public et de son parti. En octobre 2011, il est tête de liste aux législatives, élu à Malaga avec 9% des voix. IU obtient alors onze députés. En plus de figurer parmi les premiers élus de l’histoire du pays à rendre publics leurs revenus et patrimoine, il refuse la pension réservée aux parlementaires. En 2014, Garzon devient le secrétaire général d’IU. Pour les législatives de décembre 2015, et leur "remake" le 26 juin, c’est lui qui est choisi par son parti avec près de 75% des voix.
Social-démocrate rouge
Economiste critique, il n’en est pas moins accusé d’être parfois trop "social-démocrate", lorsqu’il affirme que le système capitaliste peut être réformé plutôt que détruit. Garzon défend l’idée d’un capitalisme éthique, encadré par un État très interventionniste et relancé par une nationalisation des industries. Son ennemi, si l’on peut dire, c’est la finance, le néolibéralisme et son armada de spéculateurs. En étant si postkeynésien, Garzon symbolise bien cette évolution des gauches radicales européennes vers la social-démocratie qui, simplement en remettant en question l’absence d’alternative, passent pour révolutionnaires.

Et pourtant, à côté de Podemos, c’est bien IU le "parti de gauche". Souvent, Pablo Iglesias aura tenté de dépasser le clivage gauche / droite, de jouer sur la centralité du discours et l’opposition peuple / caste. Tout ça lui valant les critiques de Garzon. Une anecdote pour percevoir leurs différences : lors de l’échec d’Alexis Tsipras à l’été 2015, Podemos a soutenu Syriza quand IU a suivi la position de Yanis Varoufakis. Une vision d’ensemble qui lui vaut d’être tout de même la figure politique préférée des Espagnols.
L’héritage et le renouveau
Alors que Pablo Iglesias a tout fait pour que la gauche non-socialiste se range sagement sous sa bannière violette, quelques têtes ont joué les rebelles. Ada Colau à Barcelone, mais aussi Alberto Garzon. Il a ainsi rappelé à Podemos qu’ils ne sont pas seuls, les poussant à « l’unité populaire ». Là où Podemos a voulu faire table rase du passé communiste, notamment en éliminant les symboles (le vocabulaire, le rouge, l’Internationale, etc.), Garzon tente le grand écart entre une gauche renouvelée et son héritage. Ce qui lui donne une position bien plus radicale et tranchée que Pablo Iglesias. Il est, par exemple, le seul leader politique national à appeler de ses vœux la IIIe République d’Espagne.
Il y a une forme de compétition entre ces deux enfants du 15-M. Pour sûr, sans Garzon, IU ne serait plus aujourd’hui qu’un souvenir. Par fidélité, le trentenaire aura permis à son parti de résister à Podemos, de lui survivre pour finalement devenir un allié indispensable. Car si le 20 décembre 2015, IU n’avait obtenu que deux députés (3,7% des voix), la formation écolo-communiste est désormais créditée de six à sept sièges au Congrès espagnol. "Unidos Podemos" : dans cette coalition des « forces du changement », IU pourrait faire la différence le 26 juin. Pour surpasser les socialistes ?
IU et Podemos voilà une gauche digne de diriger le pays si en plus il y a la Troisième République en vue !!!!
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