Le coup est sévère. Au conseil des ministres du mercredi 23 décembre, François Hollande et Manuel Valls ont décidé d’introduire dans la Constitution une mesure hautement symbolique : la déchéance de nationalité pour les binationaux nés Français, reconnus notamment coupables d’actes terroristes.
La dernière fois que la France a recouru à la déchéance de nationalité, c’était sous Vichy. Plusieurs rumeurs dans la presse laissaient penser que le gouvernement renoncerait à mettre en place cette disposition : les vives critiques émises à gauche allaient avoir raison de l’annonce de François Hollande. Que nenni. Pour le président et le premier ministre, il s’agissait de tenir bon pour affirmer haut et fort le tournant sécuritaire et l’union nationale post-attentat.
Le message envoyé à gauche est sans équivoque : la main n’est pas tendue, elle est fermement à droite toute. La ministre Christiane Taubira, qui avait dit son désaccord avec cette mesure, avale pathétiquement son chapeau : « La parole dernière est celle du président de la République », a-t-elle laconiquement déclaré avant de partir en vacances.
Un signal supplémentaire de droitisation
Le gouvernement aura non seulement abandonné le droit de vote des étrangers et le récépissé sur le contrôle au faciès, qui figuraient dans le programme du candidat Hollande, mais aura également repris le fil idéologique des propositions de la droite extrême. Florian Philippot et Marine Le Pen se sont empressés de saluer leur victoire :
Déchéance de nationalité : premier effet des 6,8 millions de voix pour le Front National aux élections régionales. MLP
— Marine Le Pen (@MLP_officiel) December 23, 2015
Déchéance de nationalité : le gouvernement préfère Marine à Christiane. Encore une victoire idéologique.
— Florian Philippot (@f_philippot) December 23, 2015
Du point de vue politique opposé, le député socialiste Pascal Cherki confirme à sa manière le sens de cette mesure gouvernementale : « Je ne vois pas comment combattre l’extrême droite en reprenant son programme ».
Comme la déchéance de nationalité n’est d’aucune efficacité pour lutter contre le terrorisme, elle a pour unique objectif d’envoyer un signal supplémentaire de droitisation. François Hollande est prêt pour cela à fouler au pied des fondamentaux de la République française, en touchant au droit du sol. Il est prêt à valider l’idée chère au Front national qu’il y aurait deux catégories de Français. Il est prêt à reprendre la logique de la double peine que le PS contestait farouchement quand Nicolas Sarkozy était au pouvoir.
La déchéance de la nationalité est un pas de plus. De trop ? Pour les députés et militants de gauche qui appartiennent à la majorité gouvernementale, la question agite assurément les consciences. De là à façonner des actes de recomposition, de refondation, il y a un pas. Si Valls et Hollande gouvernent à droite, une alternative de gauche reste à construire. Vite.
Heureusement finalement Hollande revient à la raison.
Il s’était en gagé à prendre cette mesure pas moins que devant le congrès.
Revenir sur un tel engagement pris au lendemain des crimes atroces et lâches commis le 13 novembre eût été un reniement fatal pour toute la gauche.
Hollande préfère donner raison au 40% d’électeurs du FN plutôt qu’au 3% de l’extrême gauche.
Cette mesure est une mesure surtout symbolique et psychologique, car les français ont besoin d’être rassurés psychologiquement face à toutes les menaces d’anéantissement à venir.
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