Si la candidature n’est pas encore officielle, le processus est lancé : « Mes chers collègues, nous voilà engagés dans l’aventure olympique. » Ainsi Anne Hidalgo a-t-elle ponctué l’adoption par le Conseil de Paris, lundi matin, du vœu mettant en lice la capitale pour l’organisation des Jeux olympiques 2024 – cent ans après les derniers JO d’été accueillis par la France. Un parcours long et incertain, dont les conséquences politiques, sociales et économiques sont difficiles à anticiper et à maîtriser.
Quel est le calendrier de la candidature ?
Le vote du Conseil permet à la ville d’intégrer l’association Ambition olympique et paralympique aux côtés du Comité national olympique et sportif français (CNODF) et de la région Ile-de-France.
15 septembre 2015 : date limite du dépôt de la candidature.
Janvier 2016 : confirmation des candidatures avec lettres de garantie.
Avril-mai 2016 : sélection des villes candidates par le CIO.
Janvier 2017 : date limite du dépôt des dossiers de candidature.
Février-mars 2017 : visite des villes candidates par la commission d’évaluation du CIO.
Juin 2017 : publication des rapports de la commission d’évaluation.
Été 2017 : présentation des villes candidates et élection de la lauréate.
La candidature fait-elle l’unanimité ?
Presque. Seuls les élus EELV (et avec eux le 2e arrondissement) ainsi que l’élue du Front de gauche Danielle Simonnet ont voté contre. Anne Hidalgo s’est dite « heureuse aussi que nous ayons décrété une trêve olympique afin que la politique ne pollue pas le débat ». L’heure étant au lyrisme et au consensus, elle a aussi lancé : « Notre candidature doit porter ce message universel du 11 janvier. »
Comme il s’agit aussi d’éviter les dissensions constatées lors des dernières candidatures (pour les éditions1992, 2008 et 2012), la ville a pris soin d’associer étroitement le "mouvement sportif" à son projet. Le front est également commun entre la ville, la région et l’État : reste à savoir s’il résistera aux campagnes électorales et aux éventuelles alternances. Dans l’opinion, malgré les critiques croissantes adressées aux grands événements sportifs, leur "magie" semble encore opérer – et ne parlons pas des acteurs économiques qui sauront y trouver leur intérêt.
Combien cela va coûter ?
6,2 milliards d’euros. En théorie et selon le rapport du Comité français du sport international (CFSI) remis en février. Le projet de Paris se veut « sobre » et « économiquement soutenable », tandis que le CIO insiste sur leur caractère « durable » et sur « l’héritage » légué aux territoires. Des intentions louables pour éviter la gabegie et les éléphants blancs laissés par les JO d’Athènes ou de Sotchi, mais que l’on ne pourra confirmer que dans plusieurs années. Toutes les études récentes ont invalidé la fable des "retombées économiques" mirifiques ; les bénéfices d’image, eux, restent inchiffrables (lire aussi "Jeux olympiques 2024 : Hollande se raccroche aux anneaux"). La règle en la matière est plutôt le dépassement des budgets initiaux, auxquels personne ne croit vraiment : celui de Londres est ainsi passé de 5 à 14 milliards d’euros…
Paris peut toutefois se prévaloir que des infrastructures majeures préexistent, comme le Stade de France qui aura seulement à être rénové, le vélodrome de Saint-Quentin-en-Yvelines, le Palais omnisports de Bercy ou Roland-Garros. Restent à construire le village olympique, la piscine, le centre des médias et une demi-douzaine de salles couvertes pour les différentes disciplines. Par ailleurs, la candidature s’inscrit dans le cadre du Grand Paris, qui prévoit des investissements massifs dans les transports.
Les JO représentent-ils une chance de développement ?
Cela va dépendre. Les grandes manifestations sportives internationales peuvent constituer un catalyseur si préexistent un terreau et un projet. Les Jeux olympiques à Barcelone ont constitué le levier de la transformation de la ville, aujourd’hui encore cité en référence. Le Stade de France à Saint-Denis a permis la mutation de la plus grande friche industrielle d’Europe parce qu’il s’est inscrit dans un projet urbain porté depuis des années par les villes de Saint-Denis et d’Aubervilliers [1]. Il n’en a pas été de même à Athènes : les infrastructures pour les Jeux ont été souvent sans réemploi et ont présenté des coûts insupportables pour les collectivités et les populations.
À Londres, les Jeux ont été l’occasion d’un élargissement de la métropole, de l’intégration dans la ville d’un vaste territoire en friche. La candidature parisienne s’annonce surtout comme l’occasion d’urbaniser les abords du parc de la Courneuve. C’est là le vrai défi. Combien de logements ? Comment ? Pour qui ? Avec quels équipements et infrastructures ? Quelles relations avec les quartiers voisins ? Les premières images qui se promènent ici et là montrent qu’un 4.000 de luxe n’est pas totalement écarté…
Comment faire en sorte que les JO 2024 soient populaires et démocratiques ?
En suivant de près leur organisation. Dans ce domaine, la décision revient souvent aux élus, en harmonie avec les acteurs économiques et sans réelle consultation des citoyens – dont on se contente de postuler l’adhésion avec des déclarations de principe et des sondages complaisants. Élu communiste au Conseil de Paris, Nicolas Bonnet prône « la nécessaire participation des Parisiens tout au long du processus », tandis que son groupe PCF-FdG propose la création « de comités populaires pour la réussite des Jeux olympiques et paralympiques » (lire aussi "Si l’on veut des Jeux olympiques « durables », il faudra les changer").
Il y aura en effet bien des pans de la candidature et de l’éventuelle organisation à surveiller, comme les tarifs et les conditions d’accès aux compétitions ou les contraintes imposées par les sponsors du grand cirque commercial des JO. Mais aussi les modalités d’attribution des marchés publics et des probables partenariats public-privé – dont le bilan s’avère d’ores et déjà très négatif pour la construction des nouveaux stades de l’Euro 2016, avec des coûts très mal maîtrisés pour les collectivités locales. Même exigence concernant les choix d’aménagement, afin qu’ils servent réellement l’intérêt des populations et de la métropole, qu’il s’agisse de transports, d’infrastructures et d’accès aux équipements sportifs…
Triste préfiguration des coups de Jarnac du PCF aux prochaines régionales, les élus communistes parisiens poursuivent leur ligne collaborationniste avec les soutiens de Valls et Hollande que sont Huchon et Hidalgo, sans états d’âme pour les futures gabegies au profit des Bouygues et autres Boloré et au détriment des politiques sociales, de la santé, de l’éducation, de la culture...
Leur seul souci, préserver leurs prébendes, leurs élus peau de chagrin et leur sacro-saint "parti" quitte à se renier encore et toujours. Basta !
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