Mardi et mercredi, le parlement de la CGT – le CCN – a à son ordre du jour l’avenir de la Nouvelle Vie Ouvrière – NVO, descendant de la Vie ouvrière, créé en 1909. Agnès Naton, candidate malheureuse à la succession de Bernard Thibault, secrétaire confédérale et actuelle directrice de la publication va probablement proposer l’arrêt du quinzomadaire.
Approche strictement économique
Sur le papier, l’argument est imparable : la NVO, qui est une entreprise de presse indépendante, doit son salut financier à la contribution annuelle de la confédération, soit un million d’euros par an. C’est trop pour le syndicat, dont les finances sont tendues, et il a été décidé d’y mettre un terme à la fin 2014. Selon nos informations, le journal pourrait donc être remplacé par un mensuel – ou un trimestriel – et un site internet payant, hébergé sur le site de la CGT.
Porteuse de cette proposition, la directrice ne fait pas mystère des causes structurelles du déficit. Aux difficultés de toute la presse, s’ajoutent celles plus spécifiques du syndicat (24.000 abonnés à ce jour) : « Nous ne parvenons pas aujourd’hui à toucher ces nouvelles générations salariées » (interview parue dans la NVO).
Les salariés du journal ne nient pas les difficultés financières, mais mettent en cause l’approche strictement économique du projet. Ils l’écrivaient début avril, dans une motion de défiance à l’encontre de leur directrice « Les propositions émises par le groupe de travail se bornent à proposer des "packs d’abonnements" aux syndicats et organisations de la CGT. Un modèle économique qui non seulement ne nous paraît pas viable, mais qui, par surcroît, ne s’appuie sur aucun projet ».
« On ne gagnera pas la bataille des idées en faisant de la pub »
Le scepticisme est grand vis à vis d’une proposition qui attend son salut économique d’abonnés à un site Internet. L’intégration du journal dans le portail confédéral de la CGT fait également profondément débat. Un site unique confondant prises de position de la CGT et journalisme paraît problématique aux professionnels et à des syndicats qui tiennent à leur autonomie, dont la NVO était garante. Laurent Mossino, rédacteur en chef d’Ensemble – publication adressée à tous les syndiqués – éclaire, sur le blog des salariés du journal, le débat entre information et communication : « L’info et la com, c’est un peu comme le Canada dry et l’alcool : cela se ressemble, mais ce n’est pas la même chose. Qu’est-ce que la com ? Cela a quelque chose à voir avec le marketing. À l’évidence, la CGT a besoin de communiquer plus et mieux qu’actuellement pour se faire entendre. Qu’est-ce que l’info ? C’est donner à voir et à comprendre. Ici, la presse CGT doit jouer un grand rôle. Pour faire court, on ne gagnera pas la bataille des idées en faisant de la pub ! »
Les débats larvés qui agitent la CGT depuis plus de dix ans ressurgissent. Le premier syndicat français est à la peine auprès des salariés. À la peine, aussi, pour conduire une discussion entre des conceptions différentes du syndicat. Dès lors, dans l’urgence et pour gagner en efficacité, la tentation de centraliser au niveau confédéral et autour du secrétaire confédéral tous les moyens d’expression est grande. Il se pourrait que la CGT, en supprimant son journal, se tire une balle dans le pied. Le savoir-faire des professionnels de la NVO ne se retrouverait pas de sitôt.
Avec 500k€ (soit une division par deux de la contrib CGT) tu peux faire un des plus gros sites d’information de gauche du pays, en ligne + hors série thématiques trimestriels ou semestriels + numéros spéciaux lors des mouvements sociaux.
Encore faut-il le vouloir.
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