Le casse tête de la représentativité du peuple au CSA pourrait trouver un semblant de réponse dans les semaines prochaines. C’est en tous cas ce qu’estime le porte-parole du collectif Les Indignés du PAF, Philippe Guihéneuf. Après de nombreuses rencontres « fructueuses et encourageantes », dont la dernière en date du 8 décembre à Matignon, celui-ci reste convaincu de la fin victorieuse de sa pétition lancée en vue de voir la nomination d’un « médiateur-citoyen » au sein de l’instance de régulation, lors du renouvellement des mandats des sages en janvier prochain. Une candidature sérieuse pour les uns, juste symbolique pour d’autres, contestable et même risible pour beaucoup… C’est en tous cas Philippe Guihéneuf lui-même qui pourrait être pressenti pour assumer cette responsabilité d’un nouveau genre !
Un terrain politique propice !
Bien que soutenu par quelques médias, dont Médiapart, le collectif Les Indignés du PAF n’a pas suscité un immense buzz médiatique. Et pourtant, leur action semble connaître un écho plutôt favorable auprès des responsables politiques. « Le pouvoir en place est visiblement en notre faveur, explique le très optimiste Philippe Guihéneuf, notre démarche semble être comprise et entendue et nos propositions ont été bien accueillies. Nous attendons simplement une confirmation d’au moins un des trois décisionnaires, à savoir François Hollande, Claude Bartolone ou Jean-Pierre Bel. Nous tenons à ce que la parole citoyenne, qu’il s’agisse de la nôtre ou pas, soit portée au CSA. » Rappelons que l’appel lancé par ces indignés n’est pas si récent. En 2004 déjà, l’association Les pieds dans le PAF (qui existe depuis 1988), co-fondatrice de Les indignés du PAF, lançait "Un citoyen au CSA", une pétition similaire signée notamment par François Hollande et Jean-Marc Ayrault, alors membres de l’opposition. Un argument que rappelle volontiers le collectif, notamment dans la lettre ouverte qu’il a fait parvenir au nouveau Chef de l’Etat.
La notion de rapprochement entre citoyens et autorité ayant été l’un des points d’ancrage de la campagne de François Hollande, c’est bien sur cet aspect que s’appuient Les Indignés du PAF pour faire entendre leurs revendications : « Nous ne voulons pas devenir un contre-pouvoir au contre-pouvoir que représentent médias, mais nous nous proposons de devenir un relais et une interface entre un public de plus en plus méfiant à juste titre envers des médias qui, le plus souvent sous la pression de leurs actionnaires, utilisent des méthodes de plus en plus douteuses. » martèle le porte-parole du mouvement.
Légitime défense ou simple attisement des tensions ?
« Nous pensons qu’il est urgent de repenser la fabrication de l’information pour une réconciliation tout aussi urgente entre le public et les médias, explique Philippe Guihéneuf, car ce genre de dérives arrive trop fréquemment. Et quand les études montrent que les spectateurs n’ont plus du tout confiance dans les médias, c’est le signe qu’il faut agir. » poursuit-t-il, tout en précisant qu’à ce jour, la pétition a recueilli 6000 signatures. Un constat alarmiste tempéré par le spécialiste en sciences de l’information et de la communication François Jost. Selon lui : « cette logique de défiance, de dénonciation et de flicage systématique est contre-productive. Ce leitmotiv du tous pourris me gène, explique-t-il, cela relève du pur fantasme. Ils stigmatisent les journalistes et accentuent le rapport de méfiance entre le public et les médias, tout en prônant l’idée d’une réconciliation. Je trouve cela incompatible. »
Et tandis que de son côté, Philippe Guihéneuf dans un communiqué de presse insiste sur la facilité de la faisabilité technique de leur requête, le sociologue spécialiste des médias Jean-Marie Charon prévient que : « même si l’éventualité de la nomination d’un citoyen au CSA est techniquement envisageable, il semble peu probable que cela soit pour tout de suite. Surtout, celui-ci serait très vite contesté par les acteurs du monde de l’audiovisuel, ce qui est d’ailleurs déjà le cas. Je reste convaincu que l’idée d’un besoin de représentativité des citoyens au CSA est légitime. Or, dans le cas des Indignées du PAF, et si l’on parle en terme de mécanismes démocratiques habituelles, ces derniers ne représentent rien. Il s’agit selon-moi d’une démarche autoproclamée qui a peu de chance d’aboutir. Outre la légitimité, je suis surtout tout bonnement incapable d’estimer quel poids réel ils pourraient avoir au sein d’une telle institution. » conclue-t-il.