Accueil > Spécial Cahuzac | Par Paul Chemetov | 11 avril 2013

Paul Chemetov : « Un scrutin proportionnel »

Nous avons convié différentes personnalités politiques, médiatiques, syndicales…à s’interroger, non pas sur l’affaire Cahuzac même, mais sur l’après. Les conséquences de ce scandale sont telles que nous leurs avons demander de répondre à la question suivante : Et maintenant, que fait-on pour tenter d’enrayer la catastrophe politique qui s’annonce ? Réponse de Paul Chemetov, architecte-urbaniste.

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Faudrait-il relire la comédie humaine pour déchiffrer ce que l’on sait à ce jour de l’affaire Cahuzac ? Vautrin protégeait et Rubempré et Rastignac. A nous deux Paris ! Qui, tout au long de cette longue histoire, puisqu’elle commence en 92 au moins financièrement et fiscalement, a été le Vautrin de ce mensonge et des machinations qui l’ont précédé et qui vont le suivre ? Et ce « qui » est pluriel. L’avocat qui conseilla à Jérôme Cahuzac l’ouverture de son compte suisse est un proche des Le Pen. C’est Eric Woerth qui reçoit les premiers signalements des douanes et de la DCRI. Le gestionnaire de fortune qui conseille la banque Reyl est aussi celui du précédent Président de la République. Et qui donc délivre sous le précédent gouvernement le certificat fiscal que l’on dit opportunément aujourd’hui être un faux ?

Cahuzac certes, mais Bettencourt, Karachi, Tapie et les arrières plans de l’intervention lybienne sont tous aussi révélateurs.

Tous les ingrédients sont à ce jour réunis pour que l’on puisse comme le 6 février 1934 crier « à bas les valeurs » et marcher sur la Chambre des Députés, comme aujourd’hui sur l’Assemblée Nationale ou l’Elysée. Si le Front Populaire l’emporte deux ans plus tard, la divine surprise de la défaite amène Pétain au pouvoir, adoubé tout de même par la majorité de la Chambre issue du Front Populaire, les communistes déchus de leur mandat pour cause de pacte germano-soviétique.

Le courant national et social, le fascisme à la française nait dans les dernières années du XIX° ; Celles de Boulanger comme de l’affaire Dreyfus bien avant ses avatars italiens et allemands. Discrédité à la Libération, il chemine depuis et trouve à nouveau une expression dans le Front National ; mais il faut pour réussir des troupes plus nombreuses et les anciens combattants du 6 février sont aujourd’hui remplacés par les opposants au mariage des homosexuels, qui voient en Frigide Bardot une nouvelle Jeanne d’Arc, rejoints dans cette communion par les intégristes catholiques et les nostalgiques du GUD et d’Ordre Nouveau.

L’affaire Cahuzac ne serait qu’un dernier scandale dans la longue chaine des rapports incestueux du pouvoir et de l’argent. Sans un appel d’air, les laboratoires pharmaceutiques continueront à gratifier les médecins et puisque ce lobbying existe dans la plupart des domaines d’activité, pourquoi épargnerait-il le seul monde politique ? Toutes ces affaires peuvent être le déclencheur d’une crise sociale, politique et institutionnelle. Si de nouvelles formes d’action, d’organisation de la militance politique n’émergent pas, la mèche allumée par Jérôme Cahuzac va continuer à brûler.

La confusion actuelle de la haute fonction administrative et de la direction politique, dans l’absence d’un statut des élus qui permettrait le non-cumul des mandats, doit être dépassée. Pour éviter de donner prise aux amalgames de Marine le Pen sur l’UMPS, il faut une représentation plus exacte de la démographie et de l’opinion du pays, celle d’un scrutin proportionnel. L’affaire Cahuzac pousse à d’autres pratiques que celles inhérentes à la hiérarchie des appareils, à une recomposition politique, à l’émergence de leaders dont l’autorité et la compétence sont issues de leur praxis, de leur expérience tant pratique que symbolique. Comment ne pas être attentifs à la maturité des leaders syndicaux, révélés par les fermetures de site et les licenciements massifs ? Ces hommes nouveaux d’un ordre nouveau sont aujourd’hui dans la société. A nous de les voir.

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