UNE MIDINALE À VOIR...
ET À LIRE...
Sur la tribune des personnels de justice
« La tribune a été signée par 7500 magistrats c’est-à-dire près des 3/4 du corps des magistrats qui n’ont pas l’habitude ni de signer, ni de faire des tribunes ni de participer à des manifestations. Ça montre quand même le ras-le-bol général. »
« Le Garde des Sceaux nous explique que c’est parce qu’on serait dans un contexte pré-électoral que cette mobilisation interviendrait. Qu’on ferait de la politique. Sauf que cette argumentation fait fi de la réalité. »
« La magistrature est extrêmement réservée. Elle s’exprime très peu. »
« S’il n’y avait pas une réalité, il n’y aurait pas cette mobilisation. Le contexte politique n’a donc rien à voir. »
« On a une jeune collègue de 29 ans qui s’est suicidée alors qu’elle arrivait en juridiction (…). Quand on débute, c’est comme les professeurs à l’Education nationale : on donne les postes les plus durs aux gens qui débutent. »
« Nous ne sommes donc pas dans un contexte pré-électoral mais un contexte d’épouvantable ras-le-bol. »
Sur la réalité de la justice
« On ne parle que des problèmes des moyens et c’est déjà bien. »
« Un juge des enfants à Marseille suit par exemple 500 dossiers d’assistance éducative en même temps plus 150 mineurs délinquants. On parle là de 500 enfants en danger. On n’a pas besoin d’avoir fait des études de droit pour comprendre que ça n’est pas possible. Les magistrats sont dans l’angoisse permanente de ne pas pouvoir suivre tous ces dossiers en même temps. Il faut savoir que quand un enfant est signalé au juge des enfants, c’est que déjà, ça va très très mal. »
Sur la privatisation de la justice
« Derrière le problème de moyens, il y a le problème de la qualité de la justice, du service public et d’une vision de la justice qui est en train, depuis quinze ans, de s’approcher d’une vision de la justice à l’américaine. »
« Beaucoup de personnes sont encouragées, voire obligées, de voir des médiateurs, des conciliateurs, avant d’avoir accès au juge. »
« Ça fait quinze ans qu’on est en train de supprimer le juge comme mode de règlement des conflits. »
« On se dirige de plus en plus vers une justice négociée sans vrai juge, notamment pour les petits contentieux et au pénal. »
« On voit dans les Etats généraux de la justice, que les questions qui sont posées, sont des questions totalement orientées. Du style : pensez-vous que pour les petits litiges, la conciliation peut être suffisante ? »
« On s’oriente vers une justice qui échappe à un accès démocratique. »
Sur le temps de la justice
« Le problème de la justice, c’est la lenteur. »
« Il est inadmissible quand on est licencié, et qu’on estime que c’est injuste, qu’il faille attendre trois ans pour être jugé par un conseil des prudhommes. »
« La justice est inadmissiblement lente et c’est pour ça qu’il faudrait doubler le nombre de magistrats et de greffiers. »
« Il y a des litiges qui nécessitent une instruction plus longue (…). Il est essentiel parfois de faire des enquêtes de personnalité ou des enquêtes sur l’aspect éducatif de la famille notamment pour les juges des enfants. »
« Pour les violences conjugales, la justice est beaucoup trop lente. »
Sur la cherté de la justice
« Les avocats sont contre le principe d’une justice gratuite. Il s’agit d’une profession libérale au même titre que les médecins. »
« Il faudrait considérablement augmenter le plafond de l’aide juridictionnelle. Actuellement, pour avoir un avocat gratuit, il faut avoir un petit moins de 1.000€ de revenus. Il y a donc très peu de gens qui ont un avocat totalement gratuit. »
« Il y a beaucoup de gens qui hésitent à saisir la justice. »
« On dit beaucoup que les gens n’ont pas confiance dans la justice mais ils la saisissent de plus en plus (…). Les gens en réalité déplorent surtout l’aspect service public de la justice qui n’existe plus : la lenteur, le fait de ne pas être entendu. Les gens attendent souvent des années pour n’être écoutés que cinq minutes. C’est de ça dont ils ne sont pas contents. »
Sur l’incarcération de Claude Guéant
« Je ne me réjouis jamais de l’incarcération de qui que ce soit - y compris de monsieur Guéant. »
« Le problème, c’est que depuis des années, les politiques - et notamment la droite -nous disent que les peines ne sont pas exécutées. Là, les peines sont correctement exécutées. »
« On reproche à Claude Guéant d’avoir organisé son insolvabilité. Il a vendu des biens mobiliers, des montres de luxe, une assurance vie et des avoirs qu’il avait et au lieu de les attribuer au remboursement des victimes - puisqu’il avait les moyens de le faire - il a donné l’argent semble-t-il à ses enfants dont il dit qu’ils sont dans le besoin. »
« On a estimé que Claude Guéant à continuer à aller dans des restaurants de luxe, en retirant très peu d’argent de ses comptes en banque pour vivre : la Chambre de l’application des peines a donc eu le sentiment qu’au lieu de rembourser sa dette qu’il avait envers l’Etat, il a continué à vivre selon des moyens très aisés. »
« L’avocat de Claude Guéant va faire exercer ses droits - et c’est bien normal. Il a demandé une expertise médicale comme pour toutes les personnes qui sont soit en mauvaise santé, soit âgées pour voir si sa détention est compatible avec son état de santé. »
« C’est un coup de semonce pour tous les gens qui ont une peine à exécuter et des dommages et intérêts. »
Sur Christiane Taubira
« Ce que disaient les syndicats de magistrats, c’est que Mme Taubira était quelqu’un de très respectable. Mais ils ont aussi qualifié son mandat de ministère de la parole. »
« Mme Taubira a fait de merveilleux discours, on attendait beaucoup d’elle parce qu’elle avait notamment des positions sur la prison très humaines - mais comme M. Dupont-Moretti lors de son discours d’investiture ! - mais on voulait qu’elle revienne à une justice de service public, qu’elle élargisse l’accès à l’aide juridictionnelle… Et cela n’a pas été fait. »
« Mme Taubira a mis en place la contrainte pénale mais ça n’a pas marché : au lieu de mettre quelqu’un en prison, il s’agissait de pouvoir le faire encadrer par des conseillers d’insertion et de probation pour faire en sorte qu’il trouve un boulot et un logement. Mais la mesure n’a pas été appliquée car elle était connexe avec une autre mesure, le sursis mise à l’épreuve. »
« Mme Taubira, c’est un discours fort sympathique en matière de discours et d’engagements mais le bilan réel est plus mitigé. »
Sur l’état de la gauche
« Je pense qu’il y aura une recomposition de la gauche après les législatives. »
« On ne sait pas ce qui peut se passer si l’hypothèse d’un président quel qu’il soit entraîne aux législatives une absence de majorité au Parlement : comment cela pourra-t-il se passer du point de vue la possibilité de gouverner ? »
« Je fais partie des gens qui sont, en tant que citoyens, désemparés par l’état de fractionnement de la gauche : chaque candidat considère, semble-t-il, que tout le monde doit se rassembler autour de lui. Il n’y a pas eu du tout de démarche d’unité ou de rassemblement. Et on va le payer. »
« Les égos des appareils politiques sont mortifères pour nous tous. »