Israël devant la Cour internationale de justice pour génocide : juste un symbole ?

Israël devant la Cour internationale de justice pour génocide juste un symbole

C’est une première, un pays s’en prend juridiquement à Israël et pas des moindres : l’Afrique du Sud accuse l’État hébreu de « se livrer à des actes de génocide contre le peuple palestinien ».

« Notre liberté est incomplète sans la liberté des Palestiniens. »

Nelson Mandela

L’Afrique du Sud a pris le lead et ça ne plaît pas du tout aux Israéliens. Et le symbole est des plus forts, de par le statut historique de l’accusateur, car c’est bien la « nation arc-en-ciel » de Nelson Mandela, celle qui a mis fin à l’apartheid en évitant un exil des colons, qui saisi la Cour internationale de justice (CIJ) pour qu’Israël mette fin à un « génocide ».

Ces jeudi et vendredi 11 et 12 janvier 2024, les 15 juges de La Haye vont se pencher sur les 86 pages d’accusations fournies par Pretoria étayant qu’Israël « s’est livré, se livre et risque de continuer à se livrer à des actes de génocide contre le peuple palestinien à Gaza ». Un moment qui sonne comme un tournant, tant la Palestine est abandonnée de tous : ni les pays arabes ni les puissances occidentales n’ont réussi à freiner le bras vengeur de Benyamin Netanyahou. Ce dernier, visiblement dépassé, ne cesse de se cacher derrière les terroristes du Hamas (justifiant de fait les 20 000 morts gazaouies mais aussi les tueries d’otages), nie tout déplacement de population (alors que plus de la moitié de Gaza est détruite) ou velléité d’occupation (alors que ses ministres l’ont évoquée à moult reprises). Alors un génocide !

Que ce soit l’Afrique du Sud qui brandit le droit international n’est pas si étonnant. Ces dernières semaines, Pretoria a gelé ses relations diplomatiques avec Tel-Aviv et annoncé son intention de juger les Sud-Africains participant aux exactions israéliennes. De nombreux États ont apporté leur soutien à la démarche sud-africaine, mais la CIJ pourrait-elle stopper Benyamin Netanyahou dans sa folie meurtrière ?

L’ONU peut bien alerter autant que son secrétaire général Antonio Guterres le souhaite, rien n’y fait. À la fin, Israël est toujours sauvé par le veto de son allié américain. Il n’y aura pas de cessez-le-feu à Gaza par cette voie-là. On se croirait revenu au temps où l’ONU devait stopper l’invasion russe en Ukraine mais qu’elle n’y pouvait rien à cause du veto… de la Russie.

Mais avec cette saisine de la CIJ, la situation est légèrement différente. Contrairement à la Cour pénale internationale, indépendante de l’ONU, Israël reconnaît cette instance. Le plus haut organe judiciaire des Nations unies, saisi en urgence, ne doit pas délibérer sur le fond mais permettre d’arrêter au plus vite les crimes en cours dans la bande de Gaza. Or, cette cour n’a aucun moyen pour faire exécuter ses décisions. En mars 2022, les juges de la CIJ avaient ordonné à la Russie de mettre un terme à sa guerre contre l’Ukraine… In fine, c’est toujours le Conseil de sécurité de l’ONU qui vote. Et donc les États-Unis qui laissent Israël agir impunément. Le résultat est couru d’avance, car, des mots mêmes du secrétaire d’État américain Antony Blinken, cette plainte est « dénuée de fondement ». Du côté de Londres, c’est également la panique. À croire que l’effet domino pétrifie les alliés d’Israël : si génocide il y a, complicité aussi.

En Israël, les députés s’agitent pour destituer l’un des leurs, Ofer Cassif, car celui-ci a soutenu publiquement les accusations de Pretoria. Il serait même question de le faire quitter le pays. Les membres du gouvernement contre-attaquent en accusant l’Afrique du Sud d’antisémitisme. Les ONG, les journalistes, tous sont empêchés, par la mort s’il le faut. Tous complices du Hamas, à en croire l’exécutif israélien. Une panique morale, signe que cette plainte sud-africaine n’est pas anecdotique. Ou comme le commente le média Middle East Eye : qu’Israël soit simplement accusé de génocide pourrait « contribuer à changer l’opinion publique internationale » et « nuire gravement à la réputation internationale de l’État hébreu ». Et sauver des vies.

8 commentaires

  1. Lucien Matron le 12 janvier 2024 à 05:27

    Nous attendons la réponse de l’ONU à cette accusation formulée par l’Afrique du Sud. Elle pourrait avoir un poids non négligeable pour faire taire les armes et engager de vraies négociations. Le gouvernement israélien clairement investi idéologiquement par les fondamentalistes religieux et les fascistes ne reculera pas devant l’ONU, il n’a jamais appliqué les résolutions mais la pression internationale pour un cessez le feu peut s’en trouver renforcée.

  2. Frédéric Normand le 12 janvier 2024 à 18:37

    La plainte n’est pas étayée juridiquement : le but d’Israël est d’éradiquer les combattants du Hamas au motif de ce qu’ils font, non d’éradiquer les Palestiniens au motif de ce qu’ils sont.

    • HLB le 12 janvier 2024 à 23:30

      D’après vous, Israël aurait comme but d’éradiquer le Hamas ? Etonnant, vu que ce machin terroriste a été fabriqué de toute pièce par le Qatar et….Israël ! Pour remplacer le Fatah.
      A noter aussi que, depuis le début des hostilités, l’immense majorité des victimes est composée de civils. D’abord des civils israéliens, le 7 octobre et les premiers jours, massacrés par le Hamas. Puis palestiniens, surtout femmes et enfants, méthodiquement exterminés par les colons et l’armée de Nétanyahou.
      Dans ce conflit, les très rares « victimes collatérales » sont, paradoxalement…. quelques militaires de Tsahal ou du Hamas, tués par erreur !
      C’est donc bien une épuration ethnique de la part d’Israël, exclusivement menée contre des populations désarmées. Et non contre les terroristes islamistes, bien planqués dans les souterrains.

      • Frédéric Normand le 12 janvier 2024 à 23:52

        La solution finale de la question palestinienne devrait passer par la destruction de tous les Palestiniens de Cisjordanie comme de Gaza. Impossible et moralement inacceptable. Les pires faucons israéliens le savent. Surtout que c’est impossible. Reste la fuite en avant : une politque à très long terme consistant à coloniser peu à peu les terres palestiniennes, à en repousser les habitants plus loin à l’est, au sud. Où exactement ? Ailleurs. Loin. Israël aura gagné sa Terre promise, version sioniste du Lebensraum.

        Cette vision est éminemment détestable, criminelle en plus que stiupide, mais ça n’en fait pas un génocide. Elle répond au point fixe de la politique israélienne depuis cinquante ans : il n’y aura pas d’Etat palestinien. Droite et gauche sont d’accord là-dessus. On ne peut pas négocier.

  3. Cyrano 78 le 12 janvier 2024 à 23:28

    ça n’a pas attendu, Israel se dit victime d’antisémitisme au sujet de cette plainte.

    Il est probable qu’Israel avec son petit personnel politique organise une grande manifestation contre l’antisémitisme.
    Il y aura comme la dernière fois, l’arc républicain de Zemmour, le Pen, Meyer-Habib à BHL et le printemps républicain.
    Est-ce que Regards comme la dernière fois va manifester contre l’antisémitisme et dénoncer les absents ?

    Merci de votre réponse, je suis sur que cela intéresse beaucoup de monde !!

  4. HLB le 12 janvier 2024 à 23:35

    Sans oublier les dignitaires PS/PC/EE LV, qui se précipiteront à ce genre d’initiative….

  5. Lucien Matron le 14 janvier 2024 à 08:33

    La manifestation initiée par Gérard Larcher et Yaël Braun-Pivet, les deux présidents des assemblées, s’est déroulée derrière une seule banderole «  contre l’antisémitisme ». Or, en France , la lutte contre l’antisémitisme a toujours été associée à la lutte contre le racisme. En oubliant volontairement, la lutte contre le racisme Larcher et Braun-Pivet ont vu se rallier toute l’extrême droite. C’était leur objectif, ils ont réussi mais c’est une erreur politique lourde : on ne combat pas les fondamentalistes religieux, juifs, mulsulmans, orthodoxes et catholiques par de mauvais slogans. La branche armée du Hamas est une organisation terroriste auteure de crime contre l’humanité, l’armée israélienne auteure de crimes de guerre, doivent être condamnées par les instances internationales. La voie difficile du cessez le feu et de la Paix passe par ce préalable : condamner simultanément le terrorisme du Hamas et les crimes de guerre perpétrés par Tsahal. Il n’y a pas un camp à choisir contre l’autre, toutes les victimes sont des victimes « égales », le plus souvent des enfants et des femmes.

    • Cyrano 78 le 14 janvier 2024 à 18:47

      Un génocide est un crime contre l’humanité !!!
      « les victimes sont des victimes « égales », le plus souvent des enfants et des femmes. » Oh oui !!!

      https://sos-racisme.org/

      Pour SOS Racisme, en Palestine, il ne passe RIEN !!! Etonnant non ?

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