« Le Congrès du Bloco sera l’occasion
de faire le bilan d’une année
d’intervention de la troïka au Portugal.
Nous vivons un scénario
grec : une récession non contrôlée,
des déficits des comptes publics en
hausse, un chômage record, des faillites
d’entreprises en chaîne, des services publics
menacés, des migrations massives
(5 000 personnes ont quitté notre pays
cette année, soit 1 % de la population,
c’est considérable), des commerces qui
ferment… La totale ! Les attaques au
droit du travail et au régime de protection
sociale, avec des heures supplémentaires
qui ne sont plus payées comme
avant, constituent une partie importante
de ce bilan. La question centrale de
notre Congrès sera : comment envisager
une alternative politique ? Notre conviction
est que celle-ci ne peut passer que
par une rupture avec le mémorandum qui
a transféré la richesse des travailleurs
portugais vers les poches de la grande
banque privée allemande, qui favorise
la finance internationale spéculant sur
le dos des États. Pour rompre avec les
politiques de la troïka, il faut une politique
d’alternatives économiques. L’annulation
d’une partie de la dette publique, notamment
de la part illégitime qui correspond
aux intérêts abusifs payés par l’État portugais
aux banques privées, est indispensable.
L’effet boule de neige de ces
emprunts qui sont faits pour qu’il y ait
d’autres emprunts rend les États dépendants
du monde de la finance. La question
du contrôle public du système bancaire
est posée. Même en cette période
de crise, les banques privées ont préféré
le jeu spéculatif avec la dette d’État, en
empruntant à des taux records à la BCE
(1 %) pour prêter à des taux élevés (5 ou 6 %) aux États, au lieu de financer
l’économie réelle, de prêter aux familles.
C’est pourquoi nous devons prendre le
contrôle des instruments bancaires. Il
faut également mener une réforme fiscale
pour faire payer ceux qui ont amené
le pays à la situation actuelle, notamment
les grands groupes qui sont exonérés
d’impôts. Ce sont là les grandes
lignes de la proposition économique du
Bloc de gauche.
La situation sociale du pays a changé.
Ce qui est marquant, c’est l’entrée dans
une phase de forte mobilisation sociale.
Ce qui émerge, ce sont des mouvements
citoyens, essentiellement des petits
groupes, qui ont un véritable impact
populaire. Leur mot d’ordre, c’est de
« casser la gueule » à la troïka. Ces mouvements
spontanés ont un profil politique
très fort visant à refuser l’austérité et à
exiger la chute du gouvernement actuel.
Leur lien avec le mouvement syndical se
traduit par un appel commun à la grève
général le 14 novembre prochain. Ce lien
est historique. Et ce d’autant que cet appel
à la grève générale, que nous soutenons,
est lancé le même jour en Espagne,
en Grèce, à Chypre et à Malte. C’est le
début d’une réponse européenne aux
attaques de la troïka. Le Bloco se trouve
très proche de ce mouvement social.
Nos propositions politiques font écho
aux revendications qui émergent de cette
effervescence citoyenne et syndicale.
D’ailleurs, les adhésions s’en ressentent,
notre parti se renforce.
Le Congrès du Bloco se déroule donc
dans un contexte de situation sociale
dramatique mais aussi d’offensive populaire
inédite. Le gouvernement de coalition
entre les deux partis de la droite
est fini. Il ne tiendra pas jusqu’aux prochaines
élections nationales prévues
en 2015. En face, le Parti socialiste est
dans une position fort contradictoire.
D’un côté, les socialistes s’opposent formellement
au gouvernement en place et
n’ont pas voté son budget ; de l’autre, ils
approuvent l’austérité et le mémorandum.
D’ailleurs, la troïka a pris le contrôle de
l’économie portugaise sous un gouvernement
socialiste. Nos relations avec
cette social-démocratie devenue sociallibérale
sont donc difficiles et tendues.
Mais nous progressons. Après avoir
obtenu 6 % aux élections nationales en
juin dernier, nous sommes crédités de
10-11 % aujourd’hui. »