Le soleil et un léger mistral étaient de la partie vendredi 28 à Gémenos. Juste ce qu’il fallait de météo pour parfaire une journée qui de bout en bout, s’est avérée être une réussite. Au lendemain d’un concert de soutien organisé avec le Front de gauche à Martigues, les salariés de Fralib voulaient rassembler sur leur site des salariés en lutte venus de tout le territoire. Pour parler coordination, organisation, convergence. Objectif réussi : près d’une quarantaine d’entreprises étaient représentées. Et les salariés ont pu, dans une ambiance conviviale (exemple : paella, rosé et grandes tables) et fraternelle (exemple : ukulélé et percus sur les poubelles pour une version sauvage d’On lâche rien), mettre en commun et partager leur vécu et leur expérience de bagarre pour l’emploi. Les Fralib, qui ont franchi lundi 24 juin le cap symbolique des 1000 jours de lutte étaient cités par tous comme un « modèle » en terme de longévité, de combativité mais aussi de projet de reprise alternative. C’est ce que dit Daniel, de l’entreprise Pilpa à Carcassonne, dont les salariés, après un an de lutte, s’apprêtent à déposer un projet de reprise en SCOP .
A Pilpa comme ailleurs, le refrain est désormais archi-connu : au nom d’une « rentabilité » subitement décrétée insuffisante, les patrons revendent, démantèlent, restructurent, délocalisent, licencient. Une logique globale du seul profit des actionnaires, face à laquelle les résistances isolées pèsent peu. Et qui nécessite des réponses offensives. C’est ce qu’a développé Olivier Leberquier lors du meeting en fin de matinée, s’exprimant au nom des salariés et des syndicats CGT et CGC de Fralib : « Notre initiative aujourd’hui s’inscrit dans une démarche de coordination des luttes, de cohérence, de combativité, de rassemblement, d’unité des salariés. Nous pensons utile, efficace de faire converger tous nos combats pour la défense de l’emploi et du potentiel industriel national notamment. (...) Nous sommes porteurs de réelles exigences bien d’actualité pour un vrai changement de société. Nous voudrions notamment souligner l’importance fondamentale de la réappropriation par les travailleurs de leurs moyens de production et des nationalisations démocratiques qui sont des moyens pour y parvenir. Il n’y a que les luttes qui peuvent nous permettre de reprendre aux patrons ce qu’ils nous ont pris ! La preuve en est faite avec notre lutte. »
Une réappropriation qui, de fait, donne des idées comme l’explique Marion (syndiquée à SUD), employée à Montpellier de Sanofi, la « Big pharma » d’origine française (création en 1973) dont les salariés sont aux prises depuis 2009 avec un plan de restructuration pensé par la direction comme un « processus permanent »...
La journée s’est poursuivie l’après-midi par un forum avec des prises de paroles successives des salariés. La CGT était chez elle. Très présent tout au long de la journée (avec des représentants des Unions locales, départementales, de la fédération agroalimentaire et de la Confédération), le premier syndicat de France a à la fois été célébré (« Que la CGT soit au centre de ce combat juste et légitime, nous en sommes fiers, comme nous le sommes de toute son histoire de combats pour la libération de tous les travailleurs (...) » a dit Olivier Leberquier), et interpellé : lors du forum, un syndicaliste bordelais a dit son désir d’être vite « rassuré » quant à la réelle volonté de la Confédération de tout mettre en œuvre pour permettre « l’appropriation sociale » des entreprises. Exprimant une aspiration (visiblement très partagée) à plus de radicalité dans les ripostes syndicales aux offensives patronales. Air du temps.
Mais ce sont les politiques, et singulièrement l’équipe au pouvoir, qui étaient au centre de toutes les acrimonies. « Monsieur le Président, des actes maintenant !!! » exigeait ainsi une banderole en fond de scène. Et c’est le terme de « capitulation » qui revenait le plus souvent dans les discussions à l’évocation de la politique gouvernementale.
Une capitulation qui n’était pas à l’ordre du jour vendredi. Parmi les salariés présents, ceux de Continental nutrition d’Avignon, qui sont la preuve que la lutte paie. Après un an et demi de bagarre, leur usine va être reprise et les salariés suivent actuellement une formation qui doit leur permettre de réintégrer la structure dans les semaines et/ou mois à venir. Une victoire acquise de haute lutte et sur laquelle revient Tayeb.
Vendredi à Gémenos, le carrefour des luttes de Fralib s’est achevé comme il avait commencé : dans l’appel à la lutte et à la convergence (voir encadré, col. de droite). Rendez-vous à la rentrée.